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Se fâcher pour des croyances

Par , le 6 Déc. 2009, dans la catégorie Articles - Imprimer ce document Imprimer - English version
duel de taureaux

D’où vient qu’on se dispute pour des croyances et que nos différences de convictions nous dressent si fréquemment les uns contre les autres ? Comment en vient-on à détester et à mépriser quelqu’un simplement parce qu’il ne croit pas comme nous ? Car s’il nous laisse la liberté de croire à notre guise, qu’y a-t-il dans sa différence qui nous dérange ?

L’agacement, le mépris, voire la colère que suscite le fait qu’un autre croit autrement que moi est sans aucun doute le signe que l’ego est touché. « Quoi il ne pense pas comme moi ? ! Mais comment est-ce possible ? Et pourquoi me fait-il ça, à moi ? ».

Mes croyances viennent de moi et expriment une part importante de ce que je suis ou plus exactement de ce que je crois être. Or, le moi, on dirait aujourd’hui plus volontiers l’ego, est naturellement expansionniste. Pareil à la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf, il s’efforce de s’étendre, et ses convictions ne sont souvent pour lui que l’un des moyens parmi bien d’autres par lequel il cherche à gagner du terrain sur les autres, à les mettre en quelque sorte dans son camp, pour ne pas dire à les dominer. Qu’un autre refuse d’y adhérer ou les critique, et l’ego se sent aussitôt rejeté, diminué ! En conséquence de quoi, il se fâche.

C’est ainsi que l’on peut résumer le raisonnement fallacieux qui, entre deux personnes, conduit d’un désaccord dans la pensée à un désaccord tout court : si l’autre ne pense pas ou ne croit pas comme moi, c’est donc qu’il me rejette, et s’il me rejette, c’est qu’il est mon ennemi !

Pour remédier à cet état de fait et faire preuve d’un peu plus de tolérance, il faudrait donc commencer par ne pas s’identifier à ses croyances. Si quelqu’un critique ce que je crois, ce n’est pas moi qu’il critique ; si quelqu’un me dit que je pense mal, il ne me dit pas que c’est moi qui suis mauvais. Le désaccord des autres devrait plutôt être pour chacun l’occasion de revenir sur ses croyances afin d’en examiner plus attentivement la pertinence et de se demander : se pourrait-il que ce soit l’autre qui ait raison ?

Que l’autre ait tort ou raison, peu importe. Dans les deux cas, je sortirai grandi de cette confrontation.

Car si c’est l’autre qui a raison, le fait d’en prendre conscience devrait me faire sortir de l’erreur et me rendre ainsi moins ignorant et moins orgueilleux.

Et si c’est moi qui ai raison, le fait d’avoir pu surmonter l’opposition, d’avoir su répondre à la contradiction, me permettra de prendre conscience plus clairement du bien fondé de ma croyance et me rendre ainsi plus tolérant. Car vous l’aurez peut-être observé : plus nous sommes assurés du bien fondé et de la justesse de nos pensées, moins nous sommes agacés ou énervés par ceux qui ne pensent pas comme nous.


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22 commentaires

  1. zitron pressé le 13 Déc 2009 à 8:58 1

    Pour ma part, lorsque je sens l’agacement pointer le bout de son nez, je me rappelle que je n’aime pas que l’on critique ce que je pense. Donc, à priori , il va en être de même pour mon interlocuteur.
    Alors, je me concentre sur ce qu’il dit. Puis, je m’efforce de « pousser » en avant la curiosité, la compréhension, et de voir ce que peut m’apporter l’autre. Ces efforts m’occupent bien l’esprit et; petit à petit, les préjugés et l’intolérance cèdent du terrain.
    Et effectivement, je suis toujours plus content d’avoir eu un regard affectueux et compréhensif, que d’avoir le goût âcre de l’intolérance.

  2. mike le 14 Déc 2009 à 0:52 2

    c’est vrai, j’en ai eu la preuve ce weekend en discutant avec un ami médecin sur les NDE; je lui rapportais les dernières avancées et études qui se mettent en place pour donner une valeur scientifique à toutes ces expériences que racontent les patients qui ressuscitent… d’emblée à l’annonce du sujet NDE, il commence à rigoler et me relate un ouvrage à priori plutôt humoristique sur le sujet… la discussion aurait pu s’arrêter là puisque moi je la prenait plus au sérieux et j’aurais pu me vexer ou rester à ce niveau de la discussion! donc dans un premier temps j’ai parlé de son livre pour mieux comprendre de ce qu’il en était et nous avons tiré des grandes lignes d’ailleurs sérieuses et intéressantes sur cette notion de vie après la mort, puis en rentrant dans le détail de l’étude et de ses implications médicales pratiques, il s’est progressivement mis dans le contexte et a déduit de lui même qu’une telle étude prouverait donc irréfutablement l’existence de l’âme! (alors qu’il se dit médecin plutôt agnostique dira t-on). Et l’enthousiasme de sa remarque m’a permis également de conforter encore plus ma croyance en mes propos, c’est comme si j’étais content que nous arrivions tous les deux à cette conclusion.
    Je dirais donc effectivement, parlons aux gens avec amitiés et compréhension, restons simples et modestes (je me dis toujours que j’essaye moi aussi de comprendre mieux les choses qui nous entourent mais que je ne possède pas la vérité, que je ne comprends pas tout et que surtout je n’ai pas intégré toutes les qualités ou idées dont je parle) donc souvent les malentendus sur nos croyances viennent souvent de motre arrogance à tenir des propos qu’on ne comprends pas soi même, alors on se vexe si le message n’est pas pris au sérieux; quand vous intégrez parfaitement une idée que vous avez expérimentez, vous vous mettez spontanément au niveau de compréhension de l’autre sans arrogance parce que vous connaissez le cheminement de la pensée qu’il vous a fallu pour arriver à la compréhension de ce même propos ; ou bien et c’est peut-être plus souvent le cas mais on ne se l’avoue pas, vous reconnaissez modestement que vous êtes vous même encore au même niveau de compréhension que l’autre et que vous partagez une idée avec un ami pour mieux comprendre les choses à deux dans la confrontation des idées. (j’ai eu l’opportunité de connaître ce sujet avant lui, mais cela n’implique pas que je le connaît mieux que lui! ) et on peut transposer cela à toute forme de croyance, je crois?

  3. Cogitons le 18 Déc 2009 à 17:46 3

    « plus nous sommes assurés du bien fondé et de la justesse de nos pensées, moins nous sommes agacés ou énervés par ceux qui ne pensent pas comme nous. »
    Ce n’est pas toujours ce que l’on constate. C’est même souvent l’inverse, d’ailleurs. En ce qui me concerne, mes pires périodes prosélytes et intolérantes (j’en ai eu plusieurs) étaient celles où j’étais le plus sûr de mes convictions, et surtout, de la nécessité pour la terre entière de les adopter (ce qui va généralement de pair avec la foi monothéiste).
    Je ne pense pas que que le problème soit toujours une question d’ego et d’orgueil (bien que cela puisse être le cas), ou que la solution soit de ne pas s’identifier à ses croyances (même si ce sont des pistes de réflexion intéressantes).
    Tout dépend en fait du contenu de nos croyances, et de notre lucidité par rapport à nous mêmes et à ces croyances. De nombreux croyants sincères sont convaincus, par exemple, qu’ils ont une mission de conversion envers autrui, que l’autre qui ne croit pas comme eux encourt l’enfer, ou tout au moins, est partiellement ou entièrement dans l’erreur. Et s’ils se fâchent, c’est en voulant trop « aider » l’autre, par souci pour l’autre. « Mais comment ne peut-il pas croire à la réincarnation (ou y croire), aux NDE, ou au jugement dernier!? Il faut que je lui ouvre les yeux, que je le sauve, que je le ramène sur la voie droite! ».
    D’autre aussi pensent qu’ils sont là pour défendre Dieu, et s’ils se fâchent, c’est un acte de foi, d’héroïsme, même, de fougue croyante, dans la défense de Dieu et de la Vérité (enfin, de leur Dieu ou de la Vérité, qui sont évidemment le Vrai Dieu et la Vraie Vérité)!
    Quand on est certain de détenir « La Vérité », et que cette vérité est universelle, qu’elle s’applique à tous, et surtout, si l’on se croit « élu », toute tentative d’humilité est, me semble-t-il, vouée à la fragilité.
    Par contre, si l’on se dit « voilà ce que je crois », ou plutôt, « voilà ce que je choisis de croire, pour telle ou telle raison, mais je peux me tromper », « ce vers quoi je veux tendre, mais dont je suis très loin », car on est bien conscient de ses propres faiblesse et qu’ « en réalité, sur les grandes questions métaphysiques, nous sommes tous aveugles », bref, si l’on a une foi et une démarche spirtituelle réfléchies, l’on sera, me semble-t-il, plus naturellement plus ouvert et plus tolérant.
    Enfin, c’est ma conclusion pour l’instant.
    Et je vous préviens, celui ou celle qui n’est pas d’accord ira tout droit en enfer.

  4. renée le 29 Déc 2009 à 23:15 4

    Effectivement, j’ai pu remarquer que les discussions autour de croyances divergentes me mettent mal à l’aise et du coup je me tais. je deviens très discrète, limite muette et cela n’est pas toujours satisfaisant car je pense que c’est l’excès inverse du prosélytisme actif. Sans vouloir avoir raison, il semble important de vivre sa foi et d’avoir aussi le courage de ses opinions et de ses croyances, de pouvoir les argumenter et les défendre sans tomber dans l’agressivité ni le mutisme…

  5. camille le 30 Déc 2009 à 15:57 5

    Je suis d’accord avec Cogitons lorsqu’il dit que « nous ne sommes pas toujours plus tolérants lorsque nous sommes ‘assurés du bien fondé et de la justesse de nos pensées’, au contraire » et je me revois très bien me fâcher fort contre, par exemple, tous ceux qui n’avaient pas compris que tel type de régime alimentaire était le seul qui pouvait nous faire du bien ou que telle musique n’avait aucun caractère d’authenticité, etc. En revanche, il me semble (« voilà ce que je crois »), que l’on peut atteindre des certitudes qui nous donnent l’assurance dont il est question dans l’article et qui font que nous ne sommes pas agacés par ceux qui ne pensent pas comme nous. Ce sont les certitudes auxquelles nous sommes arrivés par un long cheminement fait de réflexion, analyse, mise en pratique, etc., un processus comme celui qui est décrit dans La pratique de l’éthique (cf signet Conférences). À ce moment-là, on sait aussi que de toute façon il est inutile de vouloir convaincre qui que ce soit « du bien fondé et de la justesse de nos pensées », puisque seul un cheminement intérieur raisonné et volontaire peut mener à ce genre de certitude. Donc, discussion, échange oui bien sûr, mais pas de raison de s’agacer ou de s’énerver. On n’a rien à prouver, personne à convaincre, mais si discussion il y a, c’est l’occasion de renforcer encore notre propre conviction, de l’étayer avec des arguments rationnels. Enfin, ça, c’est dans l’idéal, bien sûr.

  6. Cogitons le 02 Jan 2010 à 0:06 6

    Camille, vous parlez de « certitude », mais il était question ici de « croyances ». Et si l’on s’en tient à la définition suivante du terme de « croyance »: « La croyance est le fait de tenir quelque chose pour vrai, et ceci indépendamment des preuves éventuelles de son existence, réalité, ou possibilité », l’on voit assez vite qu’il est plutôt enfantin de se fâcher et encore bien pire (grand classique chez l’homo-sapiens) de se haïr, voire de s’entre-tuer pour des « croyances » ou pour des mythes.
    Les « certitudes concrètes » (appelons-les comme cela), tirées de l’expérience de la vie, y-compris de la pratique délibérée de l’éthique, c’est une chose. Par exemple, je suis certain pour moi-même, parce que j’en ai fait l’expérience à maintes reprises, que la jalousie féroce ou que la rancune bileuse sont très néfastes d’abord pour soi avant d’éventuellement nuire aux autres, et qu’il est donc plus « sage » de prendre du recul et de combattre ces sentiments que d’y laisser libre-cours. Bref, d’agir avec philosophie. Mais l’on se fâche rarement sur ce genre de sujets.
    Ce sont généralement les croyances (ou pseudo-certitudes) qui concernent la « cosmologie religieuse » ou la métaphysique qui sont au coeur des fâcheries, et là, franchement, on retombe dans l’enfantillage, car que savons nous à ce sujet avec « certitude concrète » de plus que notre voisin? Vous je ne sais pas, mais moi, rien. Donc, en ce qui me concerne, pas de quoi se mettre sur la figure ou monter sur ses grands chevaux.
    Sur ces bonnes paroles (certainement critiquables), bonne année et meilleurs voeux à tous les lecteurs et contributeurs de ce site.

  7. camille le 03 Jan 2010 à 14:44 7

    C’est effectivement à la pratique raisonnée de l’éthique que je pensais en évoquant les « certitudes concrètes » (d’accord avec Cogitons pour les appeler comme ça). D’accord aussi pour la distinction croyance/certitude, mais je pense que plus important encore est effectivement ce que nous faisons de nos croyances/certitudes.
    Je voulais témoigner du processus par lequel les « certitudes concrètes » peuvent mener à une croyance (peut-être la « démarche spirituelle réfléchie » à laquelle Cogitons fait allusion?). Je m’explique: lorsqu’on a essayé de mettre en pratique des principes et obtenu des résultats qui nous semblent probants, quelquefois même presque malgré soi, c’est-à-dire avec beaucoup de scepticisme au départ; lorsqu’on a tenté d’analyser les résultats obtenus, d’y voir plus clair sur soi-même, ce qu’on est, son évolution, ce vers quoi on tend, etc.; si on en arrive peu à peu à en déduire, sans que cela heurte la logique, que ce travail éthique mené sur soi s’inscrit peut-être dans la conception plus vaste d’un système spirituel où tout élément a sa place et son sens, il ne me semble pas déraisonnable d’accepter cette idée. Je devrais sans doute cesser de dire ‘on’ et dire clairement: « voilà ce qui m’est arrivé ». Le raisonnement est enfantin, c’est vrai, mais sachant qu’avec mes capacités limitées, je ne suis en mesure de tester rationnellement ou pratiquement qu’une toute petite partie d’un ensemble, mais que tout ce que j’ai pu tester a fonctionné et s’est trouvé en cohérence avec l’ensemble, je crois que je peux me permettre de faire confiance pour le reste tout en essayant de développer mon entendement grâce au travail que je continue à fournir. En bref, les certitudes concrètes que j’ai acquises (sur quelques décennies) ont développé en moi une forme de croyance sur des questions disons métaphysiques pour simplifier, qui s’est renforcée progressivement et qui inclut la croyance en une pensée/force/transcendance, etc. omniprésente, agissante et surtout bienveillante. Cette croyance/certitude-là, je ne veux l’imposer à personne et je ne me fâche pas (trop!) si on ne la partage pas, j’ai juste envie de dire « essayez, c’est super », mais même ça je ne le dis plus, sauf si je sens que quelqu’un a vraiment envie de l’entendre.
    Moi aussi, je souhaite le meilleur pour 2010 à tous les lecteurs et contributeurs de ce site.

  8. joseph locanda le 04 Jan 2010 à 1:13 8

    Je trouve que cette question est assez complexe : oui, on a raison de défendre ses convictions ; oui, quand on pense détenir la vérité on voudrait que tout le monde croit comme nous ; oui, l’homme moderne aime le débat contradictoire ; oui, l’opposition des arguments forge la construction de la pensée… Beaucoup de vertus à l’échange virulents des idées et des croyances! Je suis pour un débat ouvert des croyances et si la question est de convaincre l’autre que l’on a raison, là, la question est tout autre. Si l’on doit se fâcher avec quelqu’un qui ne pense pas comme nous, il y a problème.
    J’ai remarqué que j’avais tendance à monter en puissance quand je n’étais pas sûr, non pas de mes croyances, mais de savoir bien les défendre. L’arrogance est alors un moyen de tenter de me faire comprendre !!! la vraie croyance produit de l’effet de parole positif et amène la tolérance et dans le propos et dans l’acceptation que l’autre peut ne pas être convaincu par mes arguments.
    Pourquoi voulons nous que les autres partagent nos croyances et nos convictions ?
    Je me suis rendu compte que j’atteignais beaucoup plus facilement mon interlocuteur quand j’étais détaché du résultat de la discussion, car justement ce qui relève de l’arrogance, voire de la suffisance, s’estompe au profit d’une rationalité dans la construction de l’argumentation et se transforme dans la forme dans une tonalité plus neutre, voire bienveillante.
    Une fois encore l’intention et le rapport à autrui sont les clés pour éviter le conflit dans lequel nous nous vautrons si facilement sur certains sujets.
    Il faut arriver à trouver l’équilibre entre défendre ses convictions et accepter la différence.
    Pour autant, il y a des sujets, ou on n’est pas prêts à faire des concessions. Si le sujet est majeur pour nous (le respect de la personne…), il ne faut pas avoir peur de d’aller au bout de ses convictions quitte à se fâcher avec l’autre. J’ai quelques amis que j’ai perdus dans mon parcours avec lesquels j’ai eu un différent que j’estimais majeur et qui m’a conduit à rompre toute relation avec eux. Il ne faut pas redouter cette situation, c’est la vie.

    Renée parlait de malaise et de repli dans le silence : je trouve que savoir se taire est une forme de protection de ses convictions. Si on pense que la cause est perdue d’avance, à quoi bon perdre du temps à discuter, à se disputer pour un résultat qui conduira à une incompréhension de part et d’autre. L’esquive n’est pas toujours la stratégie du lâche.
    L’intelligence de situation est aussi une qualité à travailler : il y a des moments où je me sens en droit d’aller défendre une cause, il y a des fois où je préfère me taire très vite, il y a plus souvent l’occasion où j’argumente avec conviction en acceptant le refus de l’autre. Mais je ne me sens pas l’âme d’un saint Jean Baptiste! Tant pis si les autres ne veulent pas croire ce que je crois, l’important est d’être convaincu soi-même et de ne pas oublier quelle est la source de nos croyances et convictions, cela permet parfois d’être un peu tolérant.
    Et si vous n’êtes pas d’accord avec moi, traversez la rue!

  9. Scha le 06 Jan 2010 à 23:30 9

    « celui qui dit ‘moi je sais’ est le plus ignorant des ignorants ».

    J’aime bien cette phrase qui, personnellement me rappelle la proximité entre une croyance et une certitude.

  10. aldar le 29 Août 2010 à 22:39 10

    Sur la question plus générale de la tolérance, je recommande les vidéos du séminaire de la fondation ostad elahi « L »invention de la tolérance ». Vidéos à l’adresse http://www.fondationostadelahi.fr/front_content.php?idcat=115.

    La définition du mot tolérance dans le dictionnaire de l’inquisition, cité par Nestor Capdevilla : « Nous tolérons ce que nous ne pouvons supprimer », me laisse rêveur ! Il y a, en chacun de nous, un petit inquisiteur. Il me semble que le dogmatisme est comme une rigidification naturelle, spontanée de l’esprit humain. Une sorte d’arthrose spirituelle dont tous les êtres humains (dès l’adolescence) sont atteints, à moins de faire en permanence l’effort de poser et toujours reposer cette question évoquée dans l’article : « se pourrait-il que ce soit l’autre qui ait raison ? ». En m’observant, je peux le voir à l’œuvre en moi. C’est, je crois, une lutte intime et acharnée que chacun doit en permanence mener.

    Comment expliquer ce fait en termes de structure psychique, structure du soi ? Je ne sais pas. Cela mériterait une analyse.

  11. zitron le 23 Nov 2010 à 9:49 11

    bien souvent, le point commun entre toutes les religions est la non tolérance

  12. Ms le 29 Mai 2011 à 20:49 12

    Je me reconnais totalement dans cet article. Je suis une personne orgueilleuse par nature, plus ou moins suivant le domaine dont il s’agit, et mon égo peut facilement être touché lorsqu’une personne n’adhère pas à mes principes voire pire lorsque les siens sont le contraire même des miens.
    Je rejoins Zitron en ce sens qu’à mon avis, la question de la tolérance se pose aussi, outre l’atteinte indéniable à notre égo. En ce qui me concerne, je suis tellement persuadée que les principes auxquels je crois sont les bons que je cherche constamment à démontrer cela. Pour être honnête, il est plus juste d’employer le terme « imposer ». En réalité, c’est tout le contraire de ce que doit être un débat. En effet, la liberté d’expression et la liberté de penser de mon interlocuteur ne sont pas du tout respecter car j’ai comme but d’imposer mon opinion. C’est également un manque de respect en ce sens où je sous-estime la personne qui m’écoute. Même si au fond, mon intention est bonne, je parais comme quelqu’un qui pense « savoir mieux », sans écouter ce que l’autre a à dire. Certes, son opinion peut ne pas être en accord avec la mienne mais rien n’empêche qu’elle soit exprimée. Je pense donc qu’il y a là un manque de tolérance au-delà même du caractère clairement prétentieux quand j’impose mes idées…

    Ayant conscience de ce défaut, j’ai pris l’initiative, tant bien que mal, de garder en tête deux citations que j’ai trouvé de manière à me recentrer en cas de déviations éventuelles dans mon comportement lors d’une discussion. La première vient d’Ostâd Elahi, « plus le champ de la pensée s’élargit, plus la patience et la tolérance augmente » et la deuxième de Baltasar Gracian Y Morales, « le premier signe de l’ignorance, c’est de présumer que l’on sait ». Au plus haut de ma forme, ces citations me permettent de retrouver en moi une forme d’humilité qui me manque donc manifestement dans ce genre de situation !

    En allant un peu plus loin, je trouve finalement intéressant ces difficultés auxquelles on peut être confronté au quotidien et je me dis que sans elles, je ne lutterai rarement voire jamais contre mes défauts. Il est vrai que, souvent, l’envie de ne pas respecter les citations pré-citer et d’imposer mes arguments sans prendre en compte la personne qui m’écoute brûle en moi mais, au final, sans ces échanges je resterai cette personne prétentieuse, bourrée d’égo et qui croit tout savoir… Personnellement, ayant conscience de trait de caractère en moi, cette dernière idée me fait peur… ! Je ne sais pas ce que vous en pensez mais je vois là l’importance primordiale de ne pas fuir ces situations et, au contraire de s’y confronter de manière stratégique et voulue dans l’objectif de s’améliorer, quel que soit le défaut dont il s’agit d’ailleurs… La société est un véritable laboratoire qui peut nous apporter tellement de richesses, profitons-en !

  13. eloise le 08 Sep 2011 à 22:56 13

    Le sage équarrit sans blesser
    Incline sans porter atteinte
    Rectifie sans faire violence
    Et resplendit sans aveugler.

    [Lao-Tseu]
    ..

  14. mike le 11 Sep 2011 à 15:57 14

    @eloise
    Isaac Newton a prouvé que lorsque tu exerces sur un matériau une force d’une certaine intensité, cela engendre une force contraire de même intensité ; et bien c’est pareil pour les relations humaines : plus tu déploies de l’énergie à essayer de convaincre quelqu’un, c’est comme si tu envoyais dans sa direction une force qui s’exerce sur lui, qui le repousse. Il le ressent, et ça l’amène à pousser dans le sens contraire. Pousse-le, il te repousse. Pousser, c’est partir de notre position et vouloir l’imposer à l’autre.
    A l inverse, Tirer, c’est partir de la position de l’autre, et petit à petit l’amener à soi… on entre dans l’univers de l’autre pour lui permettre d’en changer.

  15. lm le 12 Sep 2011 à 9:36 15

    @mike
    J’aime beaucoup cette comparaison entre cette loi scientifique de Newton, et les réactions des autres face à nos comportements, à cet effet miroir.
    Cela ne peut que nous inciter à agir avec douceur, comme l’exprime cette citation de Lao-Tseu qu’Eloise nous fait partager.
    Comme quoi certaines lois physiques ont une portée beaucoup plus “générale”.

  16. Ms le 12 Sep 2011 à 10:37 16

    L’idée de défendre mes convictions a toujours été un problème pour moi car, bien souvent, je me rends compte que c’est mon orgueil qui se manifeste plus qu’autre chose.

    Je pense que le débat est toujours bon et peut apporter beaucoup, pourtant la frontière entre le débat et ce que j’appelle « la leçon » est très minime. C’est là mon problème en ce sens que je dépasse trop souvent cette limite et manifeste une forme d’orgueil, plus ou moins importante, qui fait que je passe pour une personne qui donne des leçons. Dans certains cas, ce n’est pas le cas, mais je dois dire que, de part mon orgueil, il arrive que ce soit le cas.

    En somme, je suis d’accord avec ce qui est dit dans les commentaires – cette volonté de partager ses croyances, la volonté d’un véritable échange, apprendre de l’autre, etc. – et si une personne y arrive c’est l’idéal, mais la limite qui pousse vers l’orgueil est si petite que j’y vois un danger qui, en ce qui me concerne, rend ces situations très difficiles. L’orgueil me parait un point primordial pour ce sujet.

  17. mike le 12 Sep 2011 à 22:43 17

    @lm et Ms : plus que d’accord avec vous; c’est pourquoi il faut développer une spiritualité universelle laïque qui se base sur l’analogie avec les matières scientifiques; par ex la loi de la dynamique de Newton exprime bien cette notion qu’il ne sert à rien de bousculer l’autre mais de se mettre à sa place et le tirer vers une compréhension de lui même; il y a des choses qui relève de l’évidence et de l’expérience mais encore faut-il que les gens les aient vécues ces expériences; alors pour ne pas imposer les siennes dans le discours et ne pas être catégoriés de subjectifs, (comme pourrait l’être le maitre penseur de l’immortalité Lao Tseu que l’on pourrait aussi catégorié comme illuminé??) la connaissance des lois matérielles nous aident à comprendre le spirituel (puisque les deux sont également matière a un degrés plus subtil près! (mais ceci mérite un autre développement) ; peut-on se fâcher sur la loi de la dynamique??; elle a prouvé son universalité; ou alors on trouve tout le monde orgueilleux et catégorique (le prof de math, le scientifique qui vous enseignent à la fac aussi…) dans quel cas il est bien possible que ce soit l’auditeur qui doit changer de comportement et de vision des choses.

  18. Cogitons le 13 Sep 2011 à 14:31 18

    « resplendir sans aveugler… » Ouah! Le « sage » qui se dit à lui même, « je vais resplendir sans aveugler » ne risque pas de resplendir, mais s’aveugle certainement lui-même.
    Bien. Combien d’Hommes se sont entretués (ou détestés) au cours de l’histoire, et s’écharpent encore au nom de leurs croyances ? Chacun, bien entendu, ayant « Dieu » (ou une autre idole ou idéologie) de son côté ? Chacun ayant, bien entendu, raison ?
    Le remède à cette tragi-comédie, me semble-t-il, est un brin d’humilité et de scepticisme: admettre que l’on puisse avoir tort. Envisager, par exemple, que l’on puisse se tromper sur ses propres motifs (lorsqu’il s’agit, par exemple, de vouloir convaincre autrui).
    Tant qu’une hypothèse n’a pas été vérifiée de manière objective et universelle (et encore, certaines hypothèses vérifiées – et les théories qui en découlent – sont sujettes à révision), cela reste une ou un ensemble d’hypothèses. Si l’on veut élever la spiritualité au niveau d’une science, il n’y a aucune raison de ne pas la soumettre à ce principe. Une croyance religieuse (ou une incroyance, qui est aussi une forme de croyance), c’est l’adhérence à un ensemble d’hypothèses. Des « hypothances » (appelons comme cela les hypothèses-croyances), il y en a des milliasses. Toutes semblant généralement à leurs adhérents, tout à fait cohérentes, imparables, universelles, paradigmiques ! Alors que dans les faits, ce ne sont que… des hypothances.
    Vous trouvez que ça vaut le coup, vous, de se fâcher pour ses « hypothances » ?

  19. MH le 14 Sep 2011 à 19:00 19

    @ Cogitons: ce n’est pas le sage qui dit « je ne vais pas aveugler! » c’est un constat établi par Lao-Tseu… Le sage est humble et ne sait pas qu’il « resplendit »! Justement! C’est pour ça qu’il « n’aveugle pas »!

    Quant aux « croyances », ce ne sont QUE des « croyances »! et nous nous en fabriquons beaucoup… depuis la naissance! De fausses croyances, qui nous font dysfonctionner dans la société!
    C’est pourquoi on ne peut jamais être sûr qu’elles sont vraies!

    En revanche, nos convictions devraient être le résultat d’analyses, de conclusions, à la suite d’expériences (cf. ce que vous avez dit, Cogitons, sur vos expériences sur la jalousie…); mais là encore, nous n’avons pas à tenter de convaincre qui que ce soit! Ceux qui « entendent » ce qu’on dit (sans doute parce qu’ils ont également un cheminement spirituel, ou font un travail sur leur égo), c’est une satisfaction, mais ceux qui ne sont pas d’accord, il n’y a rien à dire: c’est sans doute qu’ils n’ont pas fait ce travail…
    Cela me rappelle une discussion avec une petite cousine, qui me disait être rancunière et ne jamais pardonner. j’ai tenté de lui dire qu’elle avait tort, que le pardon lui apporterait une joie intérieure que la haine et la rancune ne lui apporteraient jamais, mais comme elle ne l’entendait pas, je me suis tue. Elle n’a pas essayé, elle ne sait pas, ne comprend pas de quoi je parle… Si mon discours l’a « interpelée quelque part », c’est tout bon, sinon, tant pis!
    C’est là qu’il faut être tolérant: si l’autre ne comprend pas de quoi on parle, il n’est pas nécessaire de le mépriser ou d’essayer de le convaincre!

  20. mike le 14 Sep 2011 à 19:54 20

    @mh tout à fait d’accord; je pense aussi qu’on peut essayer d’aider les autres en développant une spiritualité basée sur les démonstrations scientifiques grâce à nos connaissance actuelles (qui sont elles mêmes embryonnaires mais qui permettent de construire notre société actuelles); sur ces bases saines, il faut expérimenter pour étayer les hypothèses de travail et montrer comme une démonstration mathématique ou physique que 1 + 2 = 3

  21. Cogitons le 15 Sep 2011 à 0:23 21

    Ce qu’on peut partager, me semble-t-il, ce sont effectivement nos expériences personnelles. Sans en tirer des lois générales, sauf si on l’a vu maintes et maintes fois chez d’autres (ou si des études sérieuses le montrent). D’humain à humain, dans une même galère, confrontés aux mêmes problèmes. Ça, ça a de la valeur, de la profondeur, de la substance, et de l’effet.
    Mais les hypothances métaphysiques… c’est une toute autre affaire. Et d’ailleurs généralement ce qui pose problème dans les discussions, et pour cause… deux aveugles qui prétendent voir et soutiennent mordicus des visions différentes.
    Votre petite cousine? C’est un paradoxe. On n’apprend souvent qu’en désobéissant aux conseils avisés, et par conséquent, en faisant des bêtises à répétition. Elle va souffrir de sa rancune, jusqu’au jour où, épuisée, et peut-être mûrie par la vie, elle se dira que ça ne vaut pas la peine (par exemple). Ce jour là, elle aura compris. Car il y a “comprendre” et “comprendre ». Et tout un tas de niveaux intermédiaires… Étrange processus que celui de la maturation et de la compréhension. Mais peut-être n’y comprends-je rien.

  22. mike le 19 Sep 2011 à 22:32 22

    @ cogitons : l’histoire est minée d’exemple dans lesquels on voit des peuples entiers s’égarer dans leur infortune par orgueil national et panurgisme; car malheureusement l’être humain non éduqués est faible et a besoin de meneurs qui peuvent être plus ou moins des truands; donc reposer la véracité d’une expérience sur le nombre et la galère vécue me paraît bien erroné; combien de factions, de groupes ont réfuté des idées que l’on sait maintenant vraies et qui ont valu la mort de milliers d’hommes avant de le découvrir (esclavage, science et superstition religieuse, loi et politique, abus de pouvoirs, impérialisme, égalité sociale de la femme…); la science se fondent sur des hypothèses et pourtant elle construit des choses; évidemment ou peut réfuter toute hypothèse de travail parce que non fondée mais alors on n’avance plus; on apprend plus en suivant les conseils avisés je pense et on comprend aussi plus vite si on sait se remettre en questions avec humilité et que l’on s’auto analyse en permanence et qu’on confronte nos résultats avec la réalité qui nous entoure mais pas en la copiant ou la suivant comme un mouton de Panurge.

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