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Portraits du soi impérieux (5) : le soi impérieux n’a pas de visage

Portrait du soi impérieux 5

Cet article s’inscrit dans notre série consacrée aux « portraits du soi impérieux » :
► lire la présentation générale de la série : Portraits du soi impérieux (1) : une éthique de la transformation
► voir tous les articles de la série : Portraits du soi impérieux

 

Le soi impérieux peut se retrouver partout : dans nos actions négatives mais aussi dans nos comportements en apparence les plus nobles. Il arrive ainsi fréquemment qu’on fasse le « bien » sous son impulsion. Ce n’est donc pas l’acte en lui-même qui nous permettra de le repérer mais la façon dont nous accomplissons cet acte, l’intention et les émotions qui le sous-tendent. C’est un point important. Le soi impérieux sait très bien qu’à partir d’un certain degré d’évolution intérieure, il ne peut plus se présenter sous la forme de pulsions anti-éthiques de base, facilement repérables et immédiatement rejetées par le système immunitaire de l’âme céleste (vol, agression, violence verbale, etc.). Il se présentera donc souvent sous la forme d’actions qui en elles-mêmes n’ont rien d’illicites ou sont même très bien vues, mais que nous accomplirons avec une intention négative ou sous une forme excessive et nuisible : prière du Tartuffe, charité du vaniteux qui se débrouille pour que cela se sache, mépris du bien-pensant pour tous ceux qui ne sont pas sur la « bonne voie », utilisation frauduleuse d’un principe éthique ou divin dans le but de satisfaire nos intérêts matériels, hauts cris d’indignation poussés dans l’intention de nuire à quelqu’un, accabler autrui de cadeaux et de marques d’altruisme de façon à mieux asseoir sa domination sur lui, etc.

Plus une personne a une raison saine développée, plus sa responsabilité spirituelle est grande. Ainsi, un même acte négatif ou une même pensée vile envers autrui peuvent, à une étape donnée du perfectionnement, ne pas être considérés comme des fautes, alors que ce sera le cas à une étape plus élevée. Par exemple, au début de notre perfectionnement spirituel, il est possible que nos pensées négatives envers d’autres personnes, tant qu’elles restent à l’état de pensée dans notre imagination, ne soient pas comptées comme des fautes : mais quand on sera parvenu à des étapes plus élevées, elles le seront.

Bahram Elahi, Fondamentaux du perfectionnement spirituel : le guide pratique, Paris, Dervy, 2019, chapitre 11.

Dans les inévitables dialogues intérieurs qui précèdent nos décisions éthiques, la voix du soi impérieux n’est donc pas toujours facile à déceler.

Un chauffard a cassé le rétroviseur de ma voiture et a continué sa route sans s’arrêter. Comme il était au volant d’un camionnette commerciale avec le nom de l’entreprise écrit bien visiblement, je n’ai eu aucun mal à retrouver ses coordonnées et je lui ai téléphoné pour lui demander de rembourser les dégâts causés. Je suis assez sûr de moi car plusieurs personnes qui ont assisté à la scène m’ont proposé de témoigner si j’en avais besoin. Le chauffard m’a répondu au téléphone de façon extrêmement grossière, agressive et à vrai dire menaçante. A la suite de cette pénible expérience, voici le dialogue qui a lieu en moi :

— Quel horrible personnage ! C’est incroyable des gens comme ça ! Ah ça, il va le payer cher ! Je suis sûr qu’il n’a pas d’assurance, j’ai des témoins, il est dans l’illégalité la plus complète, je peux l’aplatir comme une crêpe.
— Laisse tomber, il est vraiment trop désagréable, le mieux est de ne plus jamais avoir affaire à lui.
— Oui mais, il faut quand même qu’il paye, c’est très cher un rétroviseur ! Et tu as vu comment il m’a parlé ?
— Bah, c’est l’assurance qui s’en chargera, je n’ai qu’à leur dire que je n’étais pas là quand ça s’est passé. Et puis, je gagne bien ma vie.
— Tu vas donc te laisser humilier par cette crapule sans réagir ? Et tu vas le laisser terroriser les gens impunément ? C’est tout simplement l’encourager à user des mêmes méthodes d’intimidation avec les autres. Pourquoi s’arrêterait-il puisque ça marche si bien ?
— D’accord, il n’a pas été correct, mais si je le dénonce, ça risque de lui poser de gros problèmes, peut-être lui coûter son entreprise. Est-ce que ce qu’il a fait mérite vraiment ça ? Et puis en lui parlant, j’ai entendu des voix d’enfants derrière lui, il doit être père de famille. Il faut savoir dépasser ses intérêts personnels et être indulgent même envers ceux qui nous ont fait du mal. Ce n’est pas grave après tout, ce n’est qu’un rétroviseur…

Vu de l’extérieur, il est difficile de dire de façon définitive ici laquelle des deux voix est celle du soi impérieux. Les deux utilisent comme arguments des principes éthiques parfaitement justifiés : il est de notre devoir de défendre nos droits et ceux de la société, quand il est en notre pouvoir d’empêcher quelqu’un de continuer à nuire ; d’un autre côté, il faut aussi savoir pardonner et renoncer à son droit quand nous le pouvons. La solution pour débusquer le soi impérieux se trouve dans les émotions et sentiments qui accompagnent mes raisonnements, les courants profonds qui m’entraînent naturellement vers un côté ou vers l’autre. Je dois analyser en moi-même si je suis en colère et si je cherche à trouver des arguments pour justifier mes pulsions de vengeance ; ou si au contraire je ressens comme une paresse à m’engager dans des démarches compliquées ; ou encore si j’ai tout simplement peur d’entrer en conflit. La tâche est loin d’être aisée, d’autant que les divers sentiments, même contradictoires, ont souvent tendance à se mêler. Dans tous les cas, lutter consistera à prendre la voie qui me demandera le plus d’efforts (me forcer à entrer en conflit, ou, au contraire, réfréner mon envie d’écraser autrui) tout en essayant de respecter les droits objectifs de chacun.


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25 commentaires

  1. Bernard le 07 Mai 2020 à 23:24 1

    Bonsoir

    Pour moi cet article met en lumière l’importance de nos intentions; Ce qui est très dur à mesurer. Un moyen de connaitre notre véritable intention à mon sens est le corolaire. A titre d’exemple, je fais un acte altruiste envers quelqu’un qui non seulement ne me remercie pas mais en plus me critique. Je pense que ma réaction face à cette critique est un bon révélateur de mon intention véritable.

    1. mike le 08 Mai 2020 à 19:05 1.1

      parfaitement d’accord, en plus c’est un moment délectable pour saisir la voix du soi impérieux qui n’arrête pas de vouloir se justifier en disant que tout de même on a fait tant pour lui quel ingrat etc.

  2. Wlihelm le 08 Mai 2020 à 2:23 2

    Quand j’ai du mal à discerner si le souhait d’agir dans tel ou tel sens vient du soi impérieux ou pas, j’essaie d’utiliser la méthode de différer d’agir de plusieurs heures et je demande l’Aide de Dieu pour trouver l’inspiration, l’aide à la décision,
    En premier lieu, le soi impérieux n’aime pas attendre. C’est donc une première petite lutte contre le soi impérieux, ne pas céder à l’impulsion.
    Ensuite, avec les minutes et les heures qui passent, et surtout en pensant à autre chose, le feu de l’appétence d’agir dans tel ou tel sens s’apaise.
    Puis au moment de prendre la décision, celle-ci devient une décision raisonnable. La décision peut être fausse, ou mauvaise, mais elle est devenue souvent, après avoir été différée, le produit de la raison, pas de l’impulsion.
    Enfin, par Sa Grâce, si IL le veut bien, Dieu m’aide dans la décision.

    1. mike le 31 Mai 2020 à 21:49 2.1

      J’ai essayé votre technique dans la réponse des e-mails surtout ceux qui me déplaisent et c’est vrai que répondre à froid évite aussi les cascades d’évènements indésirables

  3. A. le 08 Mai 2020 à 6:50 3

    Merci pour cet article qui illustre bien les finesses des arguments du soi impérieux.
    Je crois avoir été confronté à une situation où le soi impérieux utilisait des arguments éthiques, dans le cadre de mon activité professionnelle.

    Voici un bref résumé: bien que je sois dans les ventes médicales, mon activité professionnelle m’oblige à organiser des événements/conférences où des médecins partagent avec d’autres confrères leurs expériences cliniques. Cela sert à vendre mes produits. Or, l’organisation de ces événements est très compliquée et alambiquée car il y a des dizaines de procédures internes à suivre.

    L’année dernière, lors de ce travail, j’ai commis des erreurs (non intentionnelles) et cela m’a valu la colère de 2 collègues. Ceux-ci ont même commencé à me critiquer devant tout le monde (en ma présence) et cela a eu lieu plusieurs fois. Au début je me suis dit que je méritais quelque part ces critiques et que cela était le prix à payer pour égaliser les droits lésés.

    Cependant, après qqs temps, je me suis rendu compte que ce raisonnement venait de mon soi impérieux et de ma réticence à me défendre. Il fallait me défendre et en même temps trouver une solution au fait d’avoir lésé des droits d’autrui. Mais il ne fallait pas se laisser humilier publiquement continuellement sans rien dire. Donc, la petite voix qui au début me disait « défend toi! et essaie en même temps de faire qq chose pour obtenir le pardon des gens dont tu as lésé les droits » était celle de mon âme. Alors que celle qui me disait: « ne fait rien, car ils ont raison et tu as lésé leurs droits » était celle de mon soi impérieux.

  4. Black_c@t le 08 Mai 2020 à 9:18 4

    Super article merci ! Mais je trouve que parfois même l’analyse de nos sentiments n’est pas facile et parfois on a aussi du mal à démêler la voie qui nous prendra le plus d’effort. Mais merci cet article donne matière à réflexion !

    1. Mike le 21 Juin 2020 à 1:05 4.1

      Bonjour, c’est vrai pour moi aussi. Je trouve que la difficulté c’est de trouver le point faible caractériel le plus évident pour les autres mais qui ne nous saute pas forcément aux yeux, celui qui nous empêche vraiment d’avancer. J’essaye en ce moment de ressentir tous les jours mes pensées gestes et sentiments qui dégagent le plus de gaz toxique, ceux qui m’empêchent d’avancer, ceux pour lesquels j’aurais honte si Dieu était assis à côté de moi… petit à petit je commence à repérer et m’y opposer.
      Rechercher ce qui s’impose trop facilement dans ma réflexion et ce que je vais suivre sans raison, les points pour lesquels la lutte sera difficile. Je crois que le pire ce sont ceux qui sont ancrés tout à fait naturellement et que l’on prend nous-mêmes pour un point fort, alors qu’il ne mène finalement qu’au plaisir de l’ego ; tout un programme d’apprentissage de soi ! Mais en même temps, il ne faut pas oublier les vrais points forts qui vont nous aider à ne pas quitter le ring et rester équilibrés dans ce monde socialement et mentalement.

  5. mike le 09 Mai 2020 à 0:25 5

    Dans votre exemple restons terriens tout d’abord; ma voiture était-elle bien engagée sur la voie?
    Ensuite je subis un dégât, j’essaye de défendre mes droits.
    Je pense que vous l’avez fait en téléphonant, (il fallait même jouer le jeu de la colère); la personne se rend compte de son erreur mais c’est un malotru il ne l’accepte pas devant vous mais intérieurement il est probablement un peu touché (en espérant pour lui qu’il ait encore un peu de remord). Mais là est la difficulté, avec ce genre de personne vous n’aurez jamais raison.
    Donc engager plus loin la justice? et perdre son temps? fulminer intérieurement sans arrêt en pensant à cette personne… on se fait du mal à soi même finalement.
    Lui écrire une lettre pour lui expliquer que ce qu’il fait est répréhensible et pas très moral, qu’il peut mettre en danger des personnes etc. Le comprendre s’il n’a pas d’assurance etc. Mais je dirais pour ma part que comme c’est un fait matériel (il n’y a pas de perte de dignité pour votre âme, personne ne se connait mais il faut quand même défendre un droit); la seule chose qui dérange l’égo c’est la manière dont la personne répond et n’accepte pas ses fautes, ça c’est dur! Mais pour l’égo égoïste je pense.

    J’ai vécu de longues périodes pendant lesquelles je luttais (dans le mauvais sens) contre l’ingratitude de certains collègues à tel point que je devenais toujours plus amer en répondant pour défendre mes droits alors que je suis plutôt qlq d’affable et en empathie envers les autres habituellement; cet état d’esprit me faisais perdre les vraies couleurs de mon âme et tout cela pour défendre une sorte de fierté mal placée finalement et sans intérêt en rapport avec mon perfectionnement spirituel; et puis je me suis souvenu d’une phrase de sagesse qui dit qu’un étudiant spirituel sincère doit toujours rechercher la faute en soi, ou tirer des leçons de ce qui lui arrive parce que ça touche ses points faibles caractériels et aussi en parallèle qu’un évènement désagréable peut être une libération sur un autre point manqué; donc cherchons à nous élever un peu, cherchons plutôt la voie du perfectionnement de notre humanité comme le dit B. Elahi.
    La vie est ainsi faite, l’homme est ingrat, les grands saints de l’histoire en sont mort et pourtant certains sont arrivés à leur perfection sans attendre de retour de la part des humains…

  6. LA le 09 Mai 2020 à 8:13 6

    Un grand merci pour cet article ainsi que chaque détail des commentaires qui m’ont aidé à clarifier mes dialogues intérieurs. Parfois pourtant il devient nécessaire de faire un choix instantané. A ces moments -là, je me remémore Son affection paternelle et Sa générosité incomparable envers l’humanité entière, et je me dis: « les reines de ta vie sont entre Ses mains, tes pensées ne font que tout compliquer. Reste sincère au plus profond de toi dans ta recherche de Sa satisfaction. Il te guidera exactement sur le chemin qu’Il t’a destiné ».

  7. KLR le 10 Mai 2020 à 12:10 7

    Merci beaucoup pour votre article, c’est vraiment très éclairant. Ce que je perçois dans la situation que vous avez exposée, c’est que pour chaque personne, il y a une façon de voir quels sont ses défauts caractériels, c’est en quelque sorte ciblé. Par exemple ici, j’aurais sans doute laissé tomber par peur du conflit, mais également par paresse pour toutes ces démarches, ce qui m’amène à bien voir en face deux de mes tendances caractérielles, contre lesquelles j’ai toujours à lutter.

    1. Radegonde le 10 Mai 2020 à 21:24 7.1

      Mon soi imperieux a la dangereuse manie de se frotter au soi imperieux des autres..ce qui fait des eclats tres desagrables pour mon ego et in fine pour mon âme.
      Je vis dans une residence qui ne confine plus depuis un mois..il est vrai qu’enfermer des enfants par un si beau soleil ce doit etre compliqué..
      Donc parents et enfants jouent toute la journée dans la cour, ce qui crée du bruit et des disputes…

      Mon Soi impérieux a commencé à s’énerver, les parents pas contents se sont aussi enervés..bref ce fut tres agressif et depuis je cherche à faire le point sur cette situation…
      J’ai l’impression d’être dans mon droit face à des gens qui sont groupés depuis 1 mois..Mais la copropriete ne dit rien…alors ne rien dire???
      Je m’interroge encore !!!!

      1. mike le 31 Mai 2020 à 21:55 7.1.1

        Votre situation est très difficile et demande beaucoup de lutte.
        Lorsque j’étais étudiant en concours, il y avait aussi des enfants qui jouaient dans une cour intérieure; la seule solution que j’avais c’était de mettre des bouchons d’oreille ou écouter de la musique; sortir est bien aussi mais plus difficile quand il y avait le confinement… je n’ai pas raté mon concours et j’ai l’impression que Dieu nous aide dans ces moments si on sait être patient et ne pas rentrer tout de suite en conflit (perdu d’avance puisque des enfants ne feront jamais attention et les parents défendent leur situation désespérée de rester dans le confinement).

  8. adissam le 13 Mai 2020 à 13:49 8

    Merci pour avoir partagé votre expérience. J’y vois déjà un bienfait, elle m’a permis une réflexion d’ordre éthique et de l’écrire. Ainsi, grâce à ce qui vous est arrivé, je suis sorti de mon moi de surface (égo) pour descendre dans mon guide intérieur.

  9. mike le 14 Mai 2020 à 14:27 9

    Il faut rester toujours vigilant face au soi impérieux…je me suis fait surprendre par des pulsions au départ défensives puis de riposte plus agressives et désagréables verbalement en réponse à une critique d’une de mes enfants… alors que je venais de faire une leçon en bon père à ses enfants de bon comportement et d’entraide envers leur maman, entraide qui permet de perfectionner son humanité et de sortir de son égo égoïste des tablettes et de confinement de sa chambre qui arrange bien…
    Donc j’ai palpé un défaut (un état colérique qui n’a pas supporté la critique qu’on a fait sur moi stipulant que je ferais des compliments non sincères envers mes enfants qui ne supportent pas que je les congratule pour ce qu’il font de bien).
    En analysant mes pensées je vois que cet état colérique pourrait être en rapport avec une tendance à imposer ma vision des choses quand j’estime qu’elle est réfléchie et secondaire à mon expérience, voire même appuyée par des écrits spirituels mais malheureusement elle peut se traduire par des reproches généralisés (chacun en prend pour son compte) sous couvert parfois de cadeaux ou congratulations, ce qui pourrait s’assimiler à ce que vous disiez plus haut ‘accabler autrui de cadeaux et de marques d’altruisme de façon à mieux asseoir sa domination sur lui’ (en tous les cas c’est perçu comme cela même si mon intention par ignorance ou non n’y est pas).
    Partager son expérience n’est pas toujours si simple et il faut épurer son intention. Éduquez ses enfants encore moins. Le miroir est très réfléchissant!!

  10. Radegonde le 16 Mai 2020 à 23:36 10

    Je pensais à l’enchainement des causes induites par nos reactions liées aux pulsions du soi impérieux. L’image qui me venait était celle des manifestants qui cherchent à defier la police.
    Ils sont blesses parfois grièvement.
    Ce qui entraine immédiatement des commentaires entre les pour et les contre.
    La personne blessée est soignée et hospitalisée si c’est grave…des spécialistes vont tout faire pour la sauver, la famille et les proches vont s’inquiéter…
    Elle peut rester handicapée..l’affaire va devenir politique, des têtes vont tomber dans la police et la justice…
    A ma petite échelle , je me demande si je suis tout à fait dans mon droit, comment agir sans blesser les uns et les autre, et moi-meme??? J’ai à peine fini d’y penser que mon soi impérieux se manifeste pour autre chose…

  11. adissam le 17 Mai 2020 à 14:19 11

    Pourquoi un tel évènement m’arrive-t-il ? Est-ce de ma faute ? Dois-je y voir une leçon ?
    Si j’étais confronté à une situation comparable j’agirais d’abord en recherchant la cause en moi-même, à savoir dans ce cas: « Est-ce que j’étais en faute ? Ai-je bien pris toutes les précautions nécessaires ? Mon véhicule était-il bien stationné ? »

    Ensuite j’utiliserais ma raison saine (forme plus mature de ma raison habituelle qui saisit la dimension spirituelle des choses) en déroulant mes intentions et actions qui ont précédé cet évènement voire plus.

    « La foi exige que nous voyions les choses de la façon suivante : 
    tout ce qui arrive à un croyant sincère qui s’est remis entre les mains 
    de Dieu est soit bon pour lui, soit porteur d’une sagesse. »
     (Paroles de Vérité, parole 426). 

    Le point important, d’après moi, est de tendre vers ce « croyant sincère ».

    Vient ensuite le fait d’avoir été témoin de l’acte répréhensible et de pouvoir identifier la société en cause.
    A nouveau, je regarderais d’abord en moi-même: « ma façon de conduire est-elle irréprochable ? » « Aurais-je une variante de ce genre d’incivilité ? Ou bien encore dans la vie en général: « suis-je peu soucieux du bien des autres ou des codes civils ? ».

    Ensuite, je ferais preuve de bon sens. Si je ne suis pas fautif, je suis en droit d’exiger réparation. Je peux également renoncer à ce droit. Or sur quels critères m’appuyer avant un tel renoncement ?

    J’ai trouvé une telle référence dans l’ouvrage la Voie de la Perfection de B. Elahi au chapitre 17 « Le comportement en ce monde » à la sous-partie « la recherche de l’équilibre »: il indique qu’avant de renoncer à son droit, il convient de prendre en compte trois critères; à savoir que ce renoncement :
    1) n’entraîne pas de perte irréparable,
    2) qu’il n’engage que moi, c’est-à-dire qu’il ne lèse pas le droit d’un tiers, ni celui de la société, et enfin
    3) que la personne au profit de laquelle nous renonçons à ce droit le mérite.


    Pour ce dernier point, après y avoir réfléchi ces dernières années, suite à des expériences similaires notamment, j’ai compris que si l’on renonce parfois à défendre son droit, par facilité bien souvent, et ainsi on peut exposer d’autres personnes à subir le même sort au risque que s’installe une forme d’impunité (« il ne s’est rien passé, je peux donc recommencer »).
    Dans ce cas, il convient de suivre les voies de défenses légales (porter plainte, conciliateur de justice, etc.).

    Enfin, bien souvent on ne trouve pas la cause. Quoiqu’il en soit, j’y vois une opportunité en or pour une pause éducative dans mon guide intérieur.

    « […] pour ceux qui avancent dans la voie de la Vérité, tout ce qui arrive est juste et bon. C’est soit l’effet de la providence divine, soit une punition, et dans les deux cas, c’est bon pour nous. Quand Il punit nous savons que nous sommes sous Son regard ; comme un enfant que sa mère attentionnée ne quitte pas des yeux, nous sommes surveillés et protégés. » (Paroles de Vérité, parole 220).

    1. adissam le 22 Mai 2020 à 13:21 11.1

      Expérience personnelle de droit bafoué.

      J’ai le souvenir d’un colocataire qui avait passé des appels via la box internet commune et qui n’avait pas réglé ses communications personnelles débitées sur mon compte. Face à l’évidence des numéros composés, il ne pouvait plus se dérober, et avait dit qu’il rembourserait mais sans mise en action malgré les relances. Son comportement s’était même endurci après plusieurs mois quand le sujet a été abordé. Cela fait maintenant plusieurs années.

      Pourquoi cela m’arrive-t-il ?
      En tournant le regard vers moi, il s’avère que quelques semaines auparavant, j’avais vendu un ordinateur à cette personne. Je m’étais demandé si le prix que j’avais demandé n’était pas trop élevé et qu’il pouvait s’agir, « après tout », d’une forme de remise à son « juste » prix.
      Après analyse, ce raisonnement n’était pas correct. D’abord d’un point de vue légal, le prix avait été accepté par l’autre partie et il n’y avait pas de vices cachés. Cette analyse « fataliste » est une forme d’abandon de droit en y creusant une justification pseudo-spirituelle (« c’était la réaction de mon acte »).

      Au final, j’avais éliminé cette hypothèse mais je ne m’en suis pas contenté. Cette expérience a en effet entraîné une recherche sur quel serait le comportement juste à adopter dans un tel cas, comme un chercheur dans son laboratoire et surtout avec l’accès à une précieuse littérature scientifique. Ceux qui ont vécu de tels dilemmes avant moi, qu’en ont-ils tiré comme conclusions ? Dois-je renoncer à mon droit ? Sous quelles conditions ? Telles étaient mes questions de départ.

      1. adissam le 23 Mai 2020 à 14:39 11.1.1

        Si je reprends les critères tirés de l’ouvrage de Pr. Elahi, à savoir que ce renoncement:

        1) n’entraîne pas de perte irréparable,
        2) qu’il n’engage que moi, « c’est-à-dire qu’il ne lèse pas le droit d’un tiers, ni celui de la société « , et enfin
        3) que la personne le mérite;

        or à l’aune de l’écriture de ces commentaires, il m’est venu une piste d’analyse que je soumets ici.

        Cette personne m’avait clairement dit quelle reconnaissait les appels passés (et facturés sur mon compte internet) et qu’elle rembourserait.

        Donc, si je reprends:
        1) la perte financière n’était pas irréparable pour moi
        2) la personne avait l’intention de rembourser donc cet acte ne posait pas un risque pour la société de récidive ultérieure de par ma faute,
        3) le méritait-elle ?

        Ce dernier point mérite réflexion et impartialité.

        Je relis la fin du paragraphe et cela s’éclaire :

        L’arbitrage entre nos différents droits et devoirs est une compétence qui ne peut s’acquérir que progressivement, par un apprentissage in vivo, en tenant compte de la répercussion de nos actes. C’est en se brûlant les doigts de manière répétée qu’on apprend à s’autogérer avec sagesse. Cela requiert de s’interroger sur l’utilité de nos actes et sur leurs conséquences matérielles et spirituelles, de faire preuve de circonspection avant d’agir et d’user de bon sens en toute circonstance. De toute évidence, si l’on ne dispose pas des principes éthiques et divins justes et qu’on n’essaie pas de les mettre en pratique in vivo, on a peu de chances de faire des progrès significatifs dans son perfectionnement spirituel. »

        Je commencer à cerner ce qu’implique cet énoncé en particulier:

        C’est en se brûlant les doigts de manière répétée qu’on apprend à s’autogérer avec sagesse.

      2. mimimone le 23 Mai 2020 à 18:25 11.1.2

        Votre réflexion sur la nécessité de ne pas laisser les droits des autres lésés parce qu’on n’a pas défendu le sien est très intéressante. Dans votre cas du colocataire qui n’a pas réglé les appels, êtes-vous arrivé à une solution finalement ?

        Dans des situations similaires, je pense qu’il y a beaucoup de paramètres que seul vous pouvez évaluer. Voici quelques pistes auxquelles j’ai pensé : 1) régler votre intention pour ne pas agir par vengeance mais seulement pour protéger vos droits ; 2) si cette personne a tendance à faire cela à d’autres, cela peut être un indice fort pour vous encourager à chercher une sanction en justice ; 3) faire attention au temps passé à cela pour que cela ne lèse pas d’autres droits légitimes à vous et à vos proches ; 4) vérifier si si vous éprouvez de manière générale un manque de courage quand il s’agit de vous défendre, ou au contraire un excès de colère non contrôlé par la raison.

      3. adissam le 28 Juin 2020 à 11:06 11.1.3

        Dans votre cas du colocataire qui n’a pas réglé les appels, êtes-vous arrivé à une solution finalement ?

        Initialement, j’étais arrivé à la conclusion que je ne devais pas renoncer à mon droit et je m’étais même mis en tête d’aller jusqu’à défendre mon droit en justice si cela s’avérait nécessaire. J’en souris aujourd’hui. En effet, il me manquait une grille de lecture méthodique, un questionnement plus approfondi et du bon sens.

        Jusqu’à la publication de cet article et la rédaction de mon expérience personnelle je n’avais pas trouvé de solution satisfaisante. Le fait d’écrire ici m’a amené a trouvé une grille d’analyse pratique fiable, notamment au chapitre 17 de la Voie de la Perfection « Le comportement en ce monde », paragraphe « la recherche de l’équilibre » :
        « C’est en se brûlant les doigts de manière répétée qu’on apprend à s’autogérer avec sagesse. Cela requiert de s’interroger sur […]. »

        Si je décortique le passage cité, j’y vois plusieurs étapes:
        1) s’interroger sur l’utilité de nos actes
        2) s’interroger sur leurs conséquences matérielles
        3) s’interroger sur leurs conséquences spirituelles
        4) de faire preuve de circonspection avant d’agir
        5) d’user de bon sens en toute circonstance

        Dans mon expérience, voici les questions qui m’ont traversé l’esprit avant d’arriver à une conclusion :
        1) Est-ce utile d’aller porter plainte ?
        – Il y a eu vol et personne identifiée.
        2) Quelles en seraient les conséquences matérielles ?
        – ça prend du temps pour aller porter plainte (quelle voix intérieure parle ?)
        – Que va-t-il se passer ensuite ?
        – Est-il même matériellement envisageable d’aller devant un tribunal pour un litige de cet ordre ? Comment fonctionne la justice là où je vis ?

        3) Quelles en seraient les conséquences spirituelles ? As-tu au moins chercher à résoudre ton litige à l’amiable sans solliciter le temps d’un agent public pour le faire à ta place (notion de droit d’autrui et de la société) ?
        Quelle est mon intention derrière cette démarche (simple réparation ou bien vengeance déguisée pour nourrir mon soi impérieux) ?

        4) de faire preuve de circonspection avant d’agir:
        Quelles seraient les conséquences de mon acte sur un éventuel casier judiciaire de cette personne ? Quelles seraient les risques ?

        5) d’user de bon sens en toute circonstance:
        Que dirait quelqu’un de plus sage à ce sujet ?

        Au final, et vu de ce contexte particulier, et en ayant évalué les trois différents critères au mieux, en faisant preuve de bon sens et sagesse, lorsqu’il m’a écrit qu’il me remboursera, j’aurais donc pu simplement lui répondre:
        « Ok…tu me rembourseras quand tu le pourras ». Point final.
        Je m’en arrête là et je n’y repense plus même si cela ne devait pas se produire.

        PS: je pense tout de même que j’aurais fait une discrète relance en cas d’oubli.
        ….
        Commence alors le travail sur la rancœur.

      4. adissam le 22 Juil 2020 à 19:10 11.1.4

        A ce jour, je tire deux enseignements suite à cette expérience:
        D’abord, prendre ses précautions avant d’engager une décision qui implique d’autres personnes (par ex. bien évaluer à qui on a affaire avant de s’engager d’un point de vue financier, ici l’abonnement, ou en cas de responsabilité commune engagée (qui est responsable des impayés ?).

        Ensuite, régler au plus vite l’affaire à deux. Et si cela n’est pas possible, alors déjà apaiser soi-même son « cœur ». Ceci m’aurait évité de ressasser indéfiniment mon mécontentement, justifié ou non, au point que cela occupe mes pensées. Il s’agit là de respecter le droit de sa psyché, selon moi.
        Quant à la rancœur, elle détériore ma relation à l’autre mais surtout elle m’affecte personnellement (libération d’hormones néfastes à mon corps). En effet, je n’ai plus dissocié l’acte de la personne au point où je ne pensais qu’à notre affaire en lui parlant. Et je ressentais un pincement de « coeur » à l’évocation de cette affaire ou bien en repensant à cette personne. J’étais ainsi le premier à subir les conséquences de ma rancoeur.

        Alors comment faire pour lutter contre la rancœur ?

        D’abord, d’après mon expérience, éviter qu’elle ne puisse prendre racine.
        Un couple racontait, dans une émission de radio, qu’ils avaient décidé ensemble d’une règle simple: « on ne se couche jamais fâché ». Toutes leurs disputes, mêmes les plus lourdes, devaient être réglées avant de s’endormir, quitte à se coucher à 3h du matin comme cela a pu leur arriver.
        Je trouve cette approche pleine de bon sens et même applicable entre personnes vivant sous le même toit.

    2. adissam le 23 Mai 2020 à 19:40 11.2

      Au sujet du troisième critère avant de renoncer à son droit, à savoir « que la personne le mérite », voici les éléments que je prendrais en compte dans ce cas:
      – a-t-elle fait un pas pour s’excuser de son acte ?
      – avait-elle l’intention sincère de réparer sa dette ?
      Je placerais toutefois cela en faveur du second critère (le droit de la société), car la personne a l’intention de rembourser donc cet acte ne poserait pas un risque de récidive ultérieure.
      Avez-vous d’autres expériences vécues et/ou clés d’analyse ?

  12. Alexandre le 18 Mai 2020 à 22:13 12

    Merci pour cet article, je trouve que les exemples cités sont très parlants et tout à fait éclairant. Ca me rappelle qu’un des angles d’attaque du soi impérieux décrit dans le chapitre 14 du Guide Pratique, est la duperie. J’éprouve personnellement beaucoup de difficulté à identifier et le soi impérieux quand il me dupe, et je me perds dans un jeu de dupe avec lui, jusqu’à en oublier contre quoi je dois lutter. C’est comme si, dans l’exemple cité dans l’article (rétroviseur cassé), au bout d’un temps à raisonner en rond, j’en arriver à oublier (c’est-à-dire me duper) si ce qui m’animait était la paresse ou la colère. Merci encore pour cet article !

  13. Radegonde le 27 Mai 2020 à 0:11 13

    Les « stigmates » que laisse le soi impérieux sur notre âme « continueront à nous faire souffrir dans l’au-delà tant qu’ils ne seront pas gommés par Lui. Afin d’éviter ces stigmates, il faut lutter in vivo contre le mal produit par notre soi impérieux » écrit B. Elahi dans La Voie de la Perfection.
    La violence, qui sort de moi parfois lors de mes emportements, laisse aussi des traces intérieures comme de l’acidité et de l’amertume tout de suite après « la crise ».
    Cette phrase très parlante de B. Elahi me touche et m’inquiète aussi, car je vois ma pauvre âme criblée de trous d’acide….
    Heureusement qu’Il est miséricordieux !

    1. mike le 31 Mai 2020 à 22:04 13.1

      C’est bien je trouve que c’est un signe d’éveil ; ensuite quand j’ai ce genre de sentiment j’utilise cet éveil associé à de la colère pour lutter contre le mal qui est en moi et éviter que cela ne se reproduise (je pense qu’il y a des acides bien plus toxiques comme la jalousie, la déprime des scrupules incontrôlables).
      Bon courage.

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