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L’argument de l’impuissance

Homme entre deux mains

Les « arguments » invoqués en faveur de l’existence d’un Dieu ne se présentent pas toujours comme des démonstrations en forme, de pures déductions rationnelles. Pascal évoquait un « Dieu sensible au cœur » qu’il opposait à la froide abstraction forgée par les philosophes et les savants. La cible était claire : l’histoire de la métaphysique regorge de figures rationnelles de Dieu (« Premier moteur immobile », « Cause première », « Nécessaire par soi », etc.). Envisagées comme prémisses ou conclusions d’une démonstration par A plus B, elles ont toutes les chances de nous laisser de marbre. Comment y reconnaître, en effet, le Dieu vivant, le « Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob » ? Peut-on prier la « Cause de soi » ? Tombe-t-on à genoux, plein de crainte, face à l’idée de l’infini, ou d’un être souverainement parfait ? Devant un tel Dieu, disait le philosophe Heidegger, l’homme ne peut ni chanter ni danser…

C’est vrai, mais le « cœur », au sens où l’entend Pascal, n’a rien d’une sentimentalité vague ; il ne se confond pas avec le domaine des émotions infra-rationnelles. Il ne faut donc pas l’opposer en bloc à la raison : il la soutient au contraire, et même il la prolonge en lui associant toutes les harmoniques, toutes les résonances qu’un argument peut trouver dans notre être lorsqu’il parvient à nous toucher.

Qu’est-ce que cela signifie, « être touché » par un argument ? Pour le comprendre, il faut tâcher de revenir à l’esprit des célèbres preuves de l’existence de Dieu. Celles-ci n’ont jamais prétendu avoir la rigueur de raisonnements mathématiques : en mettant en avant, à chaque fois, un aspect de l’idée de Dieu, c’est-à-dire un attribut particulier (indépendance, perfection, toute puissance, etc.), elles indiquent surtout une orientation, un accès, une « prise » que notre esprit fini peut se donner sur cette réalité qui, s’il s’agit bien du divin, doit nous dépasser infiniment. Autrement dit, ces preuves sont avant tout des marche-pieds, ou des tremplins ; elles donnent à la pensée un élan, un mouvement. Elles enclenchent un processus, elles sont l’occasion d’un approfondissement qui, s’il est mené avec suffisamment d’application, s’apparente à une véritable méditation.

Ainsi les preuves de l’existence de Dieu, comme l’a suggéré Pierre Hadot à propos de Descartes, peuvent être décrites comme des exercices spirituels à part entière. Mais leur rôle ne s’arrête pas là. Elles peuvent aussi, dans certains cas, s’adresser à notre faculté de discernement pratique, à une intuition aiguisée par l’expérience. Elles prennent alors la forme de suggestions étayées par des faits qui, extraordinaires ou anodins, ont valeur d’indices ou de signes, davantage que de preuves empiriques incontestables : en résonnant avec notre expérience vécue, en nous plaçant dans une certaine disposition d’esprit, elles éveillent en nous une attention plus fine, doublée d’une émotion motivante.

Telles sont les preuves du Dieu « sensible au cœur » évoqué par Pascal. Elles ont une dimension immédiatement pratique, parce qu’elles nous font percevoir quelque chose de l’action de Dieu dans nos vies. Leur but est moins d’établir de manière irréfutable l’existence de Dieu en soi, que de rendre plus tangible le mode d’existence de Dieu pour nous. Ostad Elahi en donne un exemple frappant dans son ouvrage Connaissance de l’âme. Le premier chapitre présente une série d’arguments en faveur de l’existence du « Créateur ». Certains sont notoirement difficiles, parce qu’ils mobilisent dans tout son détail une conceptualité philosophique assez aride (ainsi la preuve de l’existence du « nécessaire par soi ») ; d’autres sont au contraire parfaitement elliptiques. C’est le cas de l’argument dit « de l’impuissance ». Ostad Elahi évoque plus particulièrement « l’impuissance des créatures face à certaines réalités qui les concernent » (p. 51). De quoi s’agit-il au juste ?

Nous voudrions proposer ici quelques hypothèses de lecture. La première remarque qui s’impose est la suivante : bien qu’il soit fait mention de phénomènes extraordinaires du genre miracle, l’impuissance dont il est question dans ce paragraphe a d’abord un sens métaphysique ; elle nous renvoie à la précarité, à l’indigence essentielle de toute créature par rapport à son Créateur. Cette précarité, on peut la dire « ontologique », parce qu’elle est inscrite dans l’être même de l’homme, incapable de maîtriser son destin et même sa propre nature. On comprend qu’il ne s’agit pas simplement de la précarité ou de l’indigence attachées à ce qui, en général, est contingent (nécessaire par autrui) : c’était là l’objet des premières preuves, les plus abstraites. Non : l’impuissance a ici une portée directement « existentielle ». Elle touche concrètement à cet état de dépendance, à cette insuffisance ou une incomplétude constitutives qu’expriment, de mille manières, les frustrations les plus ordinaires de la vie (au nombre desquelles il faut bien sûr compter tous les manquements et les défauts qu’on peut se reprocher à soi-même d’un point de vue moral).

Ostad Elahi écrit ainsi : « [Garde] toujours à l’esprit la composante animale de la nature humaine. Si l’homme pouvait se passer de dormir, de manger ou de boire, s’il pouvait éloigner de lui la fièvre et le malaise, la douleur et la maladie, ou s’il pouvait se couper avec une lame sans se blesser ni saigner ni avoir mal, alors il serait évident qu’il s’est affranchi de cette spécificité inhérente à l’homme qui est de se retrouver faible et désarmé devant les exigences de sa nature, et il pourrait s’en vanter. Car il est bien évident que celui qui ne peut supporter ni le froid ni la chaleur ni la faim ni la peine, et que la moindre indisposition exténue, n’est rien d’autre qu’une petite chose bien faible et sans défense. » (Démonstration de Vérité, p. 375-376). Mais il ajoute : « C’est pourtant cette même impuissance humaine qui atteste l’unicité et l’existence de Dieu. Ce sont justement ces effets ordinaires de la nature qui témoignent du rang de la dimension spirituelle et de l’existence du monde de l’au-delà. […] Cette même impuissance de l’être humain et la faiblesse qui lui sont inhérentes prouvent bien qu’il existe une puissance supérieure qui défait toutes les résolutions de cet être humain. » (Ibid., P. 376).

L’impuissance, si nous en faisons vraiment l’épreuve, si elle parvient à trouver une résonance au plus profond de notre être, témoigne donc finalement de la présence agissante d’une puissance qui outrepasse toute puissance. Voilà l’énigme, qui se donne en même temps comme une évidence. Les situations de désespoir qui nous poussent, après avoir épuisé les derniers recours, à appeler à l’aide, à réclamer Son secours, sont propices à une telle prise de conscience. Mais on peut aussi évoquer des situations moins dramatiques où, ayant décidé d’accomplir telle ou telle chose, nous avons le sentiment vif que tout conspire à nous en empêcher, ou que ce que nous essayions à tout prix d’éviter se réalise malgré tout, comme si cela nous était intentionnellement destiné. On peut toujours expliquer ce genre d’échecs par un concours de circonstances défavorable ou par un enchaînement de causes matérielles, mais celui qui a les sens spirituels en alerte voit bien que la main de Dieu est à l’œuvre. Parfois d’ailleurs, après avoir tout essayé en vain, les choses se dénouent d’une manière qui nous paraît miraculeuse. Là encore, il est toujours possible d’interpréter ces retournements de situation inespérés comme des hasards heureux ; mais pour un œil exercé, les « coups du sort » peuvent apparaître comme de « petits miracles » et prendre ainsi valeur de preuve – au sens des « indices » récoltés par le détective au cours de son enquête. (On notera, au passage, que le terme persan qui correspond à « argument », signifie aussi bien « indice » ou « indication » susceptible de guider).

De façon générale, il y a de multiples signes et événements singuliers qui parsèment notre expérience et qui suggèrent, pour peu qu’on sache les discerner, que quelque chose dépasse l’ordre des causes tout en continuant à agir selon les voies de la causalité : c’est ce que Bahram Elahi, dans ses Fondements de la spiritualité naturelle, appelle le « métacausal ». Bien souvent, ce qu’on interprète spontanément comme le fruit du « hasard » ou de « coïncidences » peut se comprendre comme une allusion au fait qu’il existe une autre dimension où les choses se décident et se règlent. L’enchaînement des causes et des effets n’a pas à être suspendu, comme se le figurent certains partisans du miracle, mais il peut être « orienté » par le métacausal, qui intervient pour ainsi dire verticalement, selon un mode d’action transversal à la causalité naturelle. En s’en convainquant, notre confiance se renforce ; nous nous détournons d’une compréhension strictement matérielle, à courte vue, des événements ; nous apprenons à voir la main de Dieu dans ce qui nous arrive.

Comme le dit Ostad Elahi dans Paroles de Vérité : « Pour peu qu’il réfléchisse un peu, l’homme a bien conscience qu’il y a des choses qu’il recherche activement mais qu’il n’obtient pas, et qu’il y a des choses qu’il a en aversion mais qu’il est malgré tout contraint de subir. Le destin, qui s’impose à nous, nous démontre de façon très simple qu’il existe un monde autre que celui-ci et que c’est ce monde-là qui nous gouverne. » (Paroles de Vérité 1, parole 967) Et aussi : « Lorsque l’homme ne place son espoir et sa confiance qu’en Dieu, celui-ci s’occupera de lui dans les moments critiques et dénouera les difficultés d’une façon qu’il n’aurait même pas pu imaginer. Plus nous voyons Sa bonté, plus nous avons honte devant Dieu. Est-ce que, pour mériter cette bonté, nous nous sommes distingué d’une façon quelconque, par notre piété ou par nos actes d’altruisme ? Nous savons bien que non. Et pourtant, nous voyons que Dieu veille sur nous jusque dans les moindres détails de notre vie. » (Paroles de Vérité 1, parole 1662)

Ainsi chacun, quelles que soient ses convictions, peut se sentir « concerné », et donc touché, par l’argument de l’impuissance. À condition, bien entendu, d’avoir développé un minimum de vigilance. L’argument de l’impuissance ne touchera réellement que ceux qui auront pris la peine de l’approfondir et de le mettre en œuvre dans leur propre existence. C’est dire qu’il s’adresse avant tout à notre « entendement spirituel » tout en fournissant, concrètement, un moyen de l’exercer et de le développer.

Pour résumer : la constatation vécue de notre impuissance nous rend sensible à la présence et à l’action efficace d’un créateur à la fois tout puissant et aimant. Voilà ce qu’énonce l’argument de l’impuissance formulé, de manière un peu allusive, dans Connaissance de l’âme. Et si tout argument en faveur de l’existence de Dieu revient à orienter l’attention vers un ou plusieurs attributs divins, celui-ci met clairement en avant les attributs de la toute-puissance et de la miséricorde. Il permet aussi d’approfondir l’idée, mise en avant par diverses traditions religieuses, selon laquelle Dieu est unique et sans associé, c’est-à-dire qu’Il est seul agissant dans nos affaires et qu’à la fin, Lui seul peut nous venir en aide.


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21 commentaires

  1. MKN le 12 Avr 2011 à 23:52 1

    Cet argument m’a déjà interpellé avant. Ressentir Sa présence ou Son existence à travers une expérience d’impuissance necessite tout de même une croyance déjà établie dans notre créateur. A moins que cet argument soit valable pour le croyant qui traverse un moment de doute après une expérience douloureuse de la vie ? Je ne sais pas trop.
    En tout cas votre article est intéressant.

  2. Cogitons le 13 Avr 2011 à 18:15 2

    Merci pour cette analyse, d’un argument que je ne comprends toujours pas vraiment, en tout cas, au point de vue rationnel et intellectuel. Mais il est très intéressant de méditer dessus, et qui sait, un jour, d’arriver à comprendre vraiment.
    Quelques protestations coutumières:
    – « Tombe-t-on à genoux, plein de crainte, face à l’idée de l’infini ».
    Tomber à genoux face à l’idée de l’infini, absolument. Ce genre d’élan, de sentiment de révérence devant l’immensité mystérieuse n’est pas l’apanage des « croyants ». Le « Dieu » d’Einstein n’est pas le « Dieu » de Mullah Omar… Bref, on peut s’émerveiller, se prosterner intérieurement, tomber en extase, devant la nature.
    – « plein de crainte ». Mais pourquoi faut-il toujours ramener la peur, l’image de ce Dieu terrorisant, qui demande qu’on le craigne? Avons nous affaire à un dictateur qui commanderait et jouirait de notre effroi, voire, qui prendrait plaisir à juger, à condamner et à faire souffrir éternellement ses pauvres créatures créées aveugles et infirmes, de surcroît? Voilà qui a nourri et qui nourrit encore nombre de dogmes religieux et l’imaginaire des Hommes, et qui est, à mon avis d’indigent, bien plus glacial encore que les abstractions intellectuelles.
    – « la précarité, à l’indigence essentielle de toute créature par rapport à son Créateur »
    Cette précarité essentielle est d’abord et avant tout, me semble-t-il, celle de l’Homme par rapport à sa propre existence. Et c’est contre elle que l’humanité se démène depuis les origines, pour échapper à la précarité, à la faim, à la souffrance, et à la mort. On peut transférer cette idée vers le Créateur, mais de mon point de vue, elle concerne essentiellement la condition humaine.
    – « une petite chose bien faible et sans défense ». Je lis, j’essaie de comprendre, mais en quoi cela plaide-t-il en faveur de l’existence d’un Dieu qui est, de plus et tout à l’inverse, omnipotent ? Cela demeure pour moi un mystère. Pourquoi un être si puissant, qui peut tout, nous a-t-il créés si faibles… Encore une fois, difficile de répondre de manière convaincante par la raison (terme à définir, d’ailleurs), et même, par l’émotion, car cela peut heurter le sens moral.
    Bref, pour moi et ces jours-ci, il semble que ces choses relèvent essentiellement de l’émotion, de la constatation, de l’expérience intime, de l’inconscient, sans doute, de notre logiciel psychique, bref, de ce qui forge la manière dont nous interprétons le monde et ce qui se passe dans nos vies. Ce qui peut amèner un jour à dire, « Ô mon Dieu, je ne suis rien, donc Tu es tout… » Mais comment traduire une expérience, un vécu « mystique » en: a + b = c…
    Merci en tout cas pour cette tentative d’éclaircissement.

  3. disc le 16 Avr 2011 à 22:23 3

    Merci beaucoup pour cet article!
    Un jour, alors que je bricolais un peu, je me suis cogné assez fort la tête contre un rebord.
    J’ai alors remercié Dieu.
    Pourquoi?
    Car je me suis senti vraiment impuissant devant tout ce qui peut m’arriver et en particulier devant ce petit accident.
    Le fait est que sans ces rappels on risque d’oublier Dieu. Sûr de nos réussites, on se surestime et l’on oublie que l’on ne maitrise rien sans Son aide, alors ce sentiment d’impuissance nous renvoie à Celui qui tient tout entre Ses mains, à Celui qui maintient la causalité.

  4. disc le 16 Avr 2011 à 22:37 4

    Sur la crainte.
    Il y a une crainte juste. Lorsque l’on sent Sa toute puissance et notre propre notre petitesse, il y a une crainte juste, légitime et bénéfique, face à ce qui nous dépasse complètement. Ce n’est pas la crainte face à un homme ou à un dictacteur.

  5. Serena le 18 Avr 2011 à 19:59 5

    Merci pour ce merveilleux article.

    Cela me fait penser que j’essaye depuis quelque temps d’avoir un état d’esprit « détaché », des choses et des évenements, justement parce que je me dis que moi, pauvre créature, je ne suis rien et ne peux voir ce qu’il y a derrière cette porte alors que Dieu, mon créateur, est immense et Il voit et sait tout.
    Du coup je m’imagine comme un petit pion dans un jeu vidéo avec Dieu qui décide pour moi. C’est un peu simpliste et peut être même fataliste. Mais non, je reste consciente que je vis dans un monde matériel et qu’il faut que je fasse travailler le destin.

    Alors, je garde à l’esprit -enfin j’essaye- l’idée que je si telle chose est bonne pour moi on me la donnera et que si elle n’est pas bonne pour moi je n’en bénéficierai pas. Ce qui me permet de relativiser et de voir la vie de manière positive.

    Ceci est important parce que souvent il m’arrive de penser que la vie est dure et qu’on est des êtres vraiment fragiles: un coup on est affecté parce qu’on nous a mal parlé, un coup on s’énerve parce qu’on a fait la queue trop longtemps dans un magasin, un coup on est triste parce qu’on n’a pas de nouvelles de nos enfants. Bref, on est vraiment sensibles!!! Alors voilà, quand on pense à Dieu, ca égaie notre journée et on rigole soi-même de notre propre faiblesse.

  6. igloo le 22 Avr 2011 à 1:00 6

    @ Cogitons
    Si nous ne voyons pas Dieu c’est à cause de notre ego qui nous barre la vue. Quand nous percevons notre impuissance, que nous la percevons réellement, que nous sentons vraiment que nous ne pouvons rien du tout, notre ego se dégonfle et nous pouvons enfin voir. C’est comme ça en tout cas que je m’explique cette « preuve ».

  7. MIA le 23 Avr 2011 à 22:41 7

    @Igloo
    C’est intéressant cette idée que c’est l’impuissance qui fait dégonfler l’égo. Quand je suis désespérée et que je ne peux rien faire, disons que je ne vois rien à faire qui puisse avoir un effet qui me convienne alors je me tourne vers Dieu, est-ce que l’être humain cherche toujours une solution à ce qui lui arrive et se tourner vers Dieu c’est une solution… solution qui n’induit pas forcément un changement mais disons un soulagement, on peut se tourner vers Dieu au lieu de ne se tourner vers rien.
    Donc l’amélioration du ressenti est colossalement différente.

  8. MIA le 23 Avr 2011 à 22:42 8

    @Serena
    Merci pour ce commentaire… Je me concentre sur le fait de voir la vie de manière positive moi aussi. Votre idée de jeu vidéo est intéressante, ça aide beaucoup les trucs et astuces… et le personnage dans un jeu suggère une analogie peut-être. Bien que je ne joue pas, j’ai observé quelques jeux et j’ai compris qu’on passe des niveaux en réussissant à atteindre des objectifs que le jeu donne. Ensuite on change de niveau et le jeu se poursuit, un peu plus difficile. Finalement si on réussit toutes les étapes, le jeu est terminé et on a gagné.
    Pour le fait de voir la vie de manière positive, mon truc et astuce du jour est que j’essaie de noter chaque jour quelques pensées négatives qui passent, voire s’installent, alors je note en face les pensées positives qui pourraient les remplacer.
    Je n’arrive pas à le faire directement en pensée parfois, par écrit c’est nettement plus efficace

  9. Peerl le 25 Avr 2011 à 17:38 9

    Merci pour cet article intéressant.

    Pour ma part, je me représente beaucoup cette impuissance dans le fait que nous ne soyons jamais maîtres des résultats de nos actions. Ainsi, nous pouvons tout mettre en oeuvre pour parvenir à tel résultat sans y parvenir, et inversement obtenir un résultat sans y avoir mis beaucoup d’investissement. Comme il est dit dans l’article, nous pouvons y voir « la main de Dieu ».
    L’attitude que j’essaie d’avoir par rapport à cet état de fait est la suivante : tout mettre en oeuvre pour parvenir au résultat que je me suis fixé (un examen par exemple) et ensuite mettre le résultat définitif entre les mains de Dieu en sachant que c’est Lui qui décidera au final si je réussis ou non. Ceci permet de cultiver cet état de détachement (mais pas d’inaction) dont parle Serena mais également nous n’aurons pas de regret car nous aurons mis tout en oeuvre pour y arriver et si nous n’avons pas obtenu le résultat escompté c’est que c’est mieux pour moi. Par contre, si je n’ai pas tout mis en oeuvre pour parvenir au résultat, l’échec peut m’en incomber.

    @cogitons et @disc au sujet de la « crainte », il y a également une autre notion de « crainte » qui peut intervenir qui est la crainte de décevoir notre Créateur bienveillant.

  10. mila le 27 Avr 2011 à 1:16 10

    Je regrette de n’être pas à même de décrire vraiment le trouble qu’à produit en moi la lecture de ce texte… Il a « juste » dissipé quelque chose qui depuis quelque temps me séparait douloureusement, lourdement de moi. Quelle merveilleuse idée d’avoir bien voulu évoquer de la sorte « l’impuissance des créatures face à certaines réalités qui les concernent ».
    Voilà comme une main tendue, qui certainement parle à chacun mais qui étrangement semble dite « exprès » et précisément pour soi. N’est-pas là le symptôme des vérités que l’on dit vivantes et qui ont le pouvoir d’établir en soi ce lien lumineux qui va droit au cœur et qui nous ravive tout à coup quelque-part dans la noirceur .

  11. camille le 09 Mai 2011 à 0:56 11

    Est-ce que vous ne pensez pas que ce sentiment d’impuissance peut aussi survenir dans des moments de très grand bonheur? Je crois sincèrement que c’est quelque chose de cet ordre qui m’est arrivé lors de la naissance de mon premier enfant, quelque chose de si fort qu’une vague de gratitude m’a submergée et c’est devenu évident : « un créateur à la fois tout puissant et aimant ». Moi « petite chose bien faible et sans défense », complètement chamboulée mais de bonheur, et ce sentiment précisément: « je ne suis rien, donc Tu es tout. »
    Une telle émotion ne dure pas, mais elle laisse des traces définitives. En tout cas, ce que j’ai ressenti ce jour-là a contribué à me faire changer de regard radicalement.

  12. igloo le 15 Mai 2011 à 22:57 12

    @Camille
    je suis assez d’accord. on se sent comme un petit fétu de paille transporté par quelque chose d’immense, complètement impuissant mais aussi complètement heureux de l’être!

  13. camille le 17 Mai 2011 à 0:04 13

    Ce qui m’a surtout frappée, c’est que cette immense émotion qui vous submerge, ce bouleversement qu’on ne maîtrise absolument pas mais vous rend si heureux, on en a presque honte. Je ne mérite pas ça ! Moi, créature faible et désarmée, mais néanmoins orgueilleuse, égoïste et ingrate, comment est-ce qu’on peut être aussi sympa avec moi? Je me retrouve bien dans ce que dit Ostad Elahi, cité dans l’article : « Plus nous voyons Sa bonté, plus nous avons honte devant Dieu. Est-ce que, pour mériter cette bonté, nous nous sommes distingué d’une façon quelconque, par notre piété ou par nos actes d’altruisme ? Nous savons bien que non. Et pourtant, nous voyons que Dieu veille sur nous jusque dans les moindres détails de notre vie. » Et ça, ça change tout, évidemment. J’ai été tellement bouleversée par une telle générosité que ça a ouvert une lucarne sur Sa toute-puissance face à ma toute-impuissance, une toute-puissance associée à une infinie bienveillance.

  14. Ms le 31 Mai 2011 à 22:59 14

    Merci pour cette belle remise en question !

    @Peerl: Je vous rejoins lorsque vous dites: « Pour ma part, je me représente beaucoup cette impuissance dans le fait que nous ne soyons jamais maîtres des résultats de nos actions ». Je trouve aussi qu’il faudrait, idéalement, agir dans l’optique suivant laquelle nous devons faire notre maximum, fournir un maximum d’efforts dans ce que l’on entreprend sans se soucier du résultat. En effet, nous devrions laisser le résultat entre Ses mains en gardant à l’esprit que seul Lui sait ce qui est bon ou mauvais pour nous. En sommes, nous devons apporter les moyens, à Lui revient le résultat final.

    Bien évidemment, j’ai du mal à appliquer ce principe auquel je crois. En effet, je suis en ce moment dans une période assez sombre. Je sens une certaine amélioration depuis quelques mois, mais ce n’est pas encore ça. En fait, je suis trop dans la matérialité et je ne vois pas tous les bienfaits dont je bénéficie, ce qui fait que je me suis retrouvée dans une sorte de bulle remplie d’ingratitude à Son égard. Cela peut aller loin (d’une part, sur notre propre état d’esprit et, d’autre part, sur nos proches…) et traduit une forme de dépression alors même que toute personne extérieure qui regarde la situation en question de manière objective ne comprendrait pas une telle réaction. Certes, nous avons tous des problèmes mais, dans ce cas, la réaction est donc disproportionnée, ingrate.

    Suite à cela, depuis quelques semaines, pas mal d’événements désagréables et difficiles à gérer mentalement sont survenus dans ma vie comme des freins soudains, dont je ne comprenais pas l’apparition… J’ai alors eu une brutale remise en question, une sorte de choc. J’ai eu honte de mon attitude passé. Pour être plus claire, la survenance de réelles problèmes m’a fait comprendre que non seulement je n’avais aucune raison d’être aussi mal les quelques mois auparavant (bizarrement tout allait relativement bien dans ma vie, du moins rien ne justifiait une telle attitude négative de ma part) mais aussi le fait que j’étais très ingrate par rapport à la vie que j’ai de manière générale, le pire étant que je ne m’en rendais même pas compte ! Ce point peut, d’ailleurs, constituer une difficulté majeure, en plus, quant à notre remise en question !

    J’ai réellement eu l’impression que l’existence soudaine de ces soucis m’a fait comprendre beaucoup de choses. Bien évidemment, on ne se sent pas mieux du jour au lendemain mais, au moins, une certaine forme de lucidité et de remise en question nécessaire a lieu. D’un côté, je me suis rendue compte à quelle point mon état était disproportionné et injustifiée et à quel point je L’avais oublié au profit de la matérialité… C’est là qu’on se met à Le remercier et à s’excuser de notre état, bien que cela arrive tard, avoir conscience est, je pense le point de départ indispensable à notre perfectionnement. Encore une fois, je suis encore dans un état sombre, malgré quelques améliorations, et c’est la raison pour laquelle je suis souvent amenée à Le remercier en me forçant, sans forcément y croire tout le temps mais, lorsque l’ampleur de l’ingratitude est importante, je pense que c’est le passage obligé. Il faut se faire violence tout en sachant, qu’avec le temps, tout ira mieux par Son aide !

  15. Roxanna le 23 Juil 2011 à 22:56 15

    @Camille : Tu mets le doigt sur quelque chose tout à fait juste ! C’est vrai que j’ai tendance à sentir mon impuissance essentiellement dans les moments de détresse. Mais en lisant ton commentaire, j’ai repensé à des moments de pure joie que j’ai pu connaître et je me suis rendue compte que le sentiment d’impuissance a certainement pu contribuer à me plonger dans cet état d’extase. C’est d’ailleurs assez étrange je trouve.
    Par exemple, l’émotion qu’on peut ressentir devant un paysage magnifique est très certainement provoqué par le fait qu’on se sent vraiment petit et faible face à une nature qu’on ne peut contrôler et qui donc nous révèle à notre impuissance. Le sentiment d’impuissance peut-il être quelque chose de positif ?

  16. nanou le 24 Juil 2011 à 14:23 16

    @Roxanna : je pense que le sentiment d’impuissance, quand il conduit à sentir sa propre finitude, à sentir que les choses ne dépendent pas que de nous, mais qu’il faut chercher à s’en remettre à une puissance qui nous dépasse, est un sentiment très positif. Ca me semble un bon remède contre l’orgueil 😉

  17. Ms le 25 Juil 2011 à 11:16 17

    @ Roxanna, @nanou: Je suis d’accord avec nanou pour ce qui est de l’orgueil.

    Pour ma part, je trouve que ce sentiment d’impuissance va également de pair avec une autre notion décisive: la confiance en Dieu.

    C’est un point qui me pose véritablement problème en ce que justement il faut accepter que l’on ne contrôle pas tout, qu’on ne peut forcément juger ce qui est bon pour nous ou non, que tout ce qui nous arrive a lieu pour notre bien même si on souffre …
    Je dirai que, d’un côté, cela peut faire peur et puis il faut l’accepter pleinement car, bien souvent, c’est très difficile de comprendre tout ce qui nous arrive mais, de l’autre, je pense que si on y arrive, on ressent de l’amour, de la bienveillance, de l’aide, de la gratitude même, … en somme, une grande plénitude comme le sentimet de savoir qu’un père veille sur son enfant sachant qu’il ne veut que son bien !

  18. Roxanna le 03 Août 2011 à 23:03 18

    @nanou@Ms: effectivement le sentiment d’impuissance peut aider à combattre l’orgueil. C’est un de mes plus gros défauts, et me dire que la finalité de ce que j’entreprends n’est Pas soumise à ma seule volonté permet de lutter efficacement même si, il faut le dire, la guerre contre cet Orgueil est bien rude! Et pour m’aider je rejoins completemetn Ms sur la question de la confiance en Dieu et ne pas hésiter à se remettre entre ses mains…

  19. radegonde le 07 Août 2011 à 22:36 19

    si je suis si démunie, si impuissante, c’est que LUI est le TOUT, et c’est un grand bonheur de l’experimenter, de ne pas prendre l’humaine condition comme toute puissante sur cette terre..

  20. DAC le 09 Août 2011 à 17:41 20

    @ Roxanna, « Le sentiment d’impuissance peut-il être quelque chose de positif ? » Bien sûr que oui, c’est l’apanage du roseau pensant que nous sommes. Notre petitesse, notre impuissance par rapport à l’incommensurable système divin dans lequel nous sommes comme insérés, est en fait notre garantie de protection. En fin de compte, je me dis « Dieu merci, c’est Ta volonté qui prévaut ! » et me voilà rassurée, et avec moi toutes les créatures qui bénissent leur statut de créatures.

    Par ailleurs, sur le plan émotionnel, il est des instants privilégiés, instants précieux entre tous, pendant lesquels la chaleur de la présence divine fait fondre l’égo impérieux et borné qui nous gouverne ordinairement, c’est la capitulation du ‘moi je suis pour moi’, et la réalisation du ‘je suis par Toi et de Toi’. Cela veut dire que je ne m’appartiens pas mais que je T’appartiens, et en vertu de cette appartenance j’ai, pendant ces instants privilégiés, accès à la sensation consciente de la présence divine et à celle d’impuissance et d’infinie soumission qui l’accompagne ; bref j’exulte d’être Sa créature. L’expérience de la présence divine, c’est peut-être ce que vous avez ressenti devant le paysage dont vous parlez, et devant tant de grandeur, on se sent minuscule et vulnérable, mais pourtant protégé !

  21. mike le 16 Août 2011 à 0:14 21

    @ cogitons 2 ; si vous permettez, je me permets de commenter quelques unes de vos allocutions pour relancer le débat : « méditer dessus » me parait vain : il faut y gouter pour le comprendre, la philosophie ne fera pas ou peu ‘ressentir’ le vécu de l’expérience; (vous pouvez méditer, étudier la composition du sucre mais vous ne le connaîtrez pas tant que vous ne l’aurez pas sous la langue); et au préalable pour que l’expérience donne ses fruits, il faut orienter sa pensée vers une telle possibilité de découverte, comme le chercheur qui pose une hypothèse de travail.
    « tombe à genoux » est une image de celui qui a compris ce qui lui arrive, pour qui l’argument devient une évidence
     » la crainte de Dieu » sentiment que l’on devrait avoir face un son père ou sa mère : c’est la pleur de leur déplaire, toujours empreint du sentiment de bonheur de les contenter. idem à l’enfer, ce sont des images pour faire comprendre le sentiment de regret infini que l’on peut ressentir de n’avoir pas voulu voir et travailler (comme si on vous donnait le numéro gagnant du gros lot et que vous n’y croyez pas alors qu’il tombe effectivement…)
    « précarité » oui dans le sens où la créature est de toute les façons plus précaire, moins finie, plus imparfaite, moins libre que celui qui l’a créée, sinon elle se serait créée elle même, il n’y aurait plus d’Être nécessaire, la créature sera nécessaire par elle même; mais comment la chaise peut elle se créer, elle est infime par rapport au menuisier, comment l’homme peut-il se créer, même l’insémination artificielle n’est qu’une prouesse technique de rencontre de deux germes qui existent déjà eux même…
     » les célèbres preuves de l’existence de Dieu n’ont jamais prétendu avoir la rigueur de raisonnements mathématiques… ces preuves sont avant tout des marche-pieds, ou des tremplins ; elles donnent à la pensée un élan, un mouvement. Elles enclenchent un processus, elles sont l’occasion d’un approfondissement qui, s’il est mené avec suffisamment d’application, s’apparente à une véritable méditation.
    « une petite chose bien faible et sans défense ». oui! avaler un noyau de cerise de travers et vous verrez que vous pouvez y passer…chaque seconde, notre vie peut-être écourtée mais pourtant nous poursuivons notre chemin tant bien que mal; c’est dans ce sens qu’il y a dans la Création une bienveillance; mais au préalable il faut se sentir redevable de quelque chose pour se dire c’est que quand même incroyable, je vis bien, je profite et on ne me demande rien en retour et en plus le sors est avec moi dans certaines situations et d’ailleurs même dans celles qui nous déplaisent, car au final on voit que c’est dans notre intérêt; imaginez vous à la fac, si vous ne bossez pas, vous redoublez voire êtes jeté. Je veux avoir le droit de comprendre, de progresser, d’avoir mon doctorat, donc le moindre de mes premiers devoir c’est d’écouter, de comprendre, d’apprendre ce que l’on dit et de passer les examens.
    il y a beaucoup d’autres choses à dire mais cela devient long pour ce post.

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