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Altruisme imaginaire, égoïsme réel

Par , le 11 Nov. 2013, dans la catégorie Pratiques - Imprimer ce document Imprimer - English version
illusion d'optique

« La nature de l’amour propre et de ce moi humain est de n’aimer que soi et de ne considérer que soi. » (Blaise Pascal, Pensées)

Récemment, j’ai été confronté à une succession de désagréments. D’abord, ce jeune homme qui me bouscule en entrant dans le métro ; ensuite, ce collègue qui me demande de bien vouloir achever son travail au moment où il s’apprête à quitter le bureau ; ou encore, ces autres collègues qui ne cessent de me déranger au milieu d’une tâche importante en me posant toujours la même question à laquelle je ne sais quoi répondre… Cette série d’incidents étalés sur une durée de deux jours m’a mis dans un état d’énervement et de mauvaise humeur que je ne m’étais jamais connu jusqu’alors.

Le soir, en me rappelant ces événements, je ressentais cet énervement m’envahir de manière presque physique. N’étant plus en situation, je me trouvais dans la position de pouvoir m’observer comme un scientifique le ferait d’un animal inconnu dont il découvre le comportement étrange. Comment ces événements insignifiants pouvaient-ils à ce point m’affecter ? Les jours suivants, j’ai continué de m’observer. Mais rien. Puis j’ai changé d’angle de vue : j’avais jusque-là cherché à comprendre les effets du comportement des autres sur moi ; et si j’examinais plutôt les effets de mon comportement sur les autres ?

Ce fut comme une révélation : « Recherche la cause en toi-même ». Je me rendais compte que le même passager, qui entre dans le métro en maugréant et en me bousculant durant l’heure de pointe, est en fait plutôt ma victime que mon bourreau : souvent je prends tranquillement mes aises, j’occupe sans y prêter attention tout l’espace devant la porte. En envisageant les choses ainsi, « les autres » faisaient soudain irruption dans ma réalité. Avec stupeur, je réalisais brutalement, et dans le détail de situations concrètes, l’ampleur de mon égoïsme. Je « palpais » la réalité de cet égoïsme en moi, cet égoïsme qu’Ostad Elahi a défini en ces termes : « L’égoïste est celui qui ne veut rien d’autre que lui-même. Il veut tout pour lui-même et ne pense pas aux autres » (BG, parole 27).

Au fond, je prenais conscience de ce simple fait : en dehors de moi, il y a les autres.

Oh, certes, cela faisait longtemps que j’avais accepté l’idée que j’avais des tendances égoïstes et que je devrais lutter contre par quelque forme d’altruisme. Mais il s’agissait d’une vue théorique, très éloignée de ma réalité, et dont je m’étais longtemps satisfait. Soudain je prenais conscience de mes contradictions : je me gargarise d’un service rendu à quelqu’un, mais je suis sans arrêt en retard à mes rendez-vous, ou bien je laisse traîner mes affaires dans le bureau que je partage, ou encore je ne prends pas la peine d’appeler mes proches pour donner de mes nouvelles et prendre des leurs. Altruisme imaginaire, réalité égoïste. J’avais détecté quelques comportements égoïstes, il me fallait les traquer plus systématiquement et en examiner les ressorts en moi, pour prendre concrètement conscience de mon égoïsme viscéral, c’est-à-dire du fait que, profondément, je ne veux rien d’autre que moi-même, je veux tout pour moi-même et je ne pense pas aux autres.

  1. J’ai d’abord cherché en moi la responsabilité des sentiments négatifs des autres à mon égard, révélés par leurs remarques ou reproches, leurs mouvements d’humeur, leurs soupirs ou parfois même certaines plaisanteries. Certes, sans considérer que l’autre a nécessairement raison, et sans nier son éventuelle responsabilité, mais en m’efforçant d’en faire abstraction pour déplacer l’attention sur moi-même. C’est ainsi que j’ai découvert certains aspects peu reluisants de ma personnalité. Je n’en étais certes pas fier, mais d’avoir pu ainsi les démasquer m’encourageait à persévérer : j’étais sur la bonne voie.
  2. Ensuite, j’ai porté mon attention sur les actes positifs des autres. Cela m’a inspiré à agir pareillement. Cela a produit en moi un respect nouveau pour ceux qui m’entourent. J’ai découvert une multitude de gestes d’attention dont je faisais l’objet sans m’en rendre compte, parfois même de la part de personnes dont j’avais tendance à me plaindre. J’ai pu apprécier la valeur de ces actes, l’effort consenti par l’autre et le bien qui m’avait été fait.
  3. J’ai tenté de me mettre réellement à la place des autres. J’ai réalisé que ma compréhension de ce principe s’était limitée jusque-là à projeter sur autrui mes propres aspirations. Or vouloir pour autrui ce qu’on veut pour soi-même, cela ne consiste pas à ériger nos désirs et notre manière de voir les choses en une norme applicable à tous. Je songeais à Pascal, et à sa caractérisation du moi « haïssable » : le moi, écrivait-il, est « injuste en soi en ce qu’il se fait centre de tout ». Même lorsqu’il sauve les apparences en tâchant de se rendre aimable aux autres, il continue d’agir en pratique comme s’il était le centre du monde. Et je comprenais mieux la parole d’Ostad Elahi : « L’homme parfait est celui qui pratique pour les autres ce qu’il veut pour lui-même, et ce qu’il ne veut pas pour lui-même, il en préserve aussi les autres. C’est très facile à dire, mais en pratique c’est très difficile à appliquer. Plus on parvient à pratiquer cette règle, plus on devient parfait en humanité. Il faut se contrôler 24 heures sur 24 en étant son propre juge. » (BG, parole 263).
  4. Enfin, j’ai procédé à des « analyses de pensée », comme on fait des analyses de sang. La composition du sang renseigne précisément sur l’état de santé du corps, celle de la pensée ne reflète-t-elle pas l’activité de mon âme et de ses puissances ? En analysant systématiquement ma pensée (à heures fixes par exemple), selon un protocole bien défini (cf. ci-après ma liste de questions), je peux mesurer ma qualité d’âme, très différente de l’image que je me fais de moi-même. Voici les questions qui m’ont aidé à interpréter la qualité des échantillons de pensée :
    • Quelle place est-ce que je laisse aux autres dans la conversation ? Suis-je sincèrement à l’écoute de l’autre ?
    • Quelle est la place laissée à l’autre dans ma pensée ? Quel type de pensée est-ce que je développe concernant l’autre ?
    • Quelle est mon intention quand je rends service ? Suis-je frustré si je n’ai pas en retour de réaction positive, de gratitude notamment ?
    • Quel est mon degré d’implication quand je rends service ? Est-ce que je vais jusqu’au bout de mon action ?

Ce travail de détection et d’analyse de l’égoïsme (et de l’illusion d’altruisme) en moi m’a conduit tout naturellement à rechercher les moyens de lutter contre ses manifestations et de maîtriser cette tendance dont je faisais le constat in vivo. J’ai pu progressivement expérimenter plusieurs approches :

  1. L’autosuggestion, en me rappelant régulièrement à moi-même ce constat d’égoïsme, en me convaincant du fait qu’il est primordial de développer l’altruisme et qu’il faut en passer pour cela par une lutte âpre contre l’égoïsme. Me mettant ainsi dans le « bon état d’esprit », je me prédisposais à être plus attentif aux autres et donc à agir de manière altruiste – car de toute évidence, et contrairement à l’illusion que j’avais pu nourrir par le passé, dans le vif d’une situation donnée je n’ai pas spontanément le réflexe altruiste.
  2. Je me suis entraîné à « sortir de mon ego » plusieurs fois par jour, c’est-à-dire à m’extirper du tumulte du quotidien, à extraire mon esprit du flot incessant des préoccupations, contrariétés, soucis ou aspirations en rapport avec ma vie matérielle et mon point de vue égocentré. Cet effort psychique intense permet de suspendre un instant ce flot, même si c’est pour y être irrésistiblement aspiré l’instant d’après. Quel délice que cette bouffée, même fugace ! Pendant cet instant, soudain m’apparaissent les autres, leurs angoisses, leurs pressions, leurs priorités, et aussi leurs droits que mes pulsions impérieuses me portaient à piétiner sans y prendre garde. Paradoxe : pour être réellement attentif aux autres, je dois me tourner vers mon intérieur, détecter les pulsions qui me poussent à piétiner leurs droits ; je dois cultiver au fond de moi l’aspiration à un comportement éthique.
  3. Je suis rentré dans le vif du sujet en travaillant sur le comportement vis-à-vis de mes proches, qui sont les victimes les plus exposées à mes poussées d’égoïsme, et dont la fréquentation quotidienne m’offre une multitude d’occasions de lutte et d’expérimentation. En effet, lorsque tombe le vernis des bonnes manières et des conventions auxquelles on s’astreint en société, c’est bien souvent au contact des proches que je m’autorise à « me lâcher » après avoir accumulé la pression d’une journée de travail : alors je n’écoute plus que ma faim, ma fatigue, mon envie de repos ; je me laisse aller à l’agacement, à des mouvements d’humeur, etc. L’autosuggestion et l’exercice qui consiste à « sortir de l’ego » ne suffisent pas à surmonter cette difficulté. Pour développer concrètement une disposition altruiste, il me fallait définir des objectifs précis et adopter de nouveaux comportements. Par exemple, j’ai souvent l’habitude de laisser mes chaussures dans le couloir : à quoi bon les ranger, puisque je les rechausserai demain de toute façon ? Or, en pratiquant les deux exercices précédents, j’ai réalisé à quel point mes proches étaient indisposés par ce petit désordre. Je me suis donc décidé à ranger systématiquement mes chaussures dès que je rentre à la maison. Autre exemple : je m’assieds toujours en fond de table, là où on ne se lève jamais pendant le repas pour servir les autres ? Prenant conscience de cette habitude, je me suis-je décidé à m’asseoir à une autre place.

En réalité, je n’étais pas au bout de mes peines. Car après quelques jours de cette pratique, j’étais devenu… une personne désagréable au possible ! Un rien m’énervait, les autres m’énervaient, mon humeur était devenue massacrante, et ce d’autant plus que j’étais devenu hypersensible à ce que je percevais dans mon entourage comme de l’ingratitude, une inaptitude à reconnaître les efforts que me coûtaient ma pratique. En y réfléchissant, je me suis rendu compte que cette réaction correspondait à une forme de résistance intérieure de l’ego. Agir de manière altruiste par simple devoir humain, et dans le but de se perfectionner spirituellement, c’est autre chose qu’agir afin de donner le change ou de se faire bien voir des autres. Il ne faut pas en attendre de gratification immédiate. Voir la réalité de mon égoïsme et démasquer mon altruisme imaginaire, c’était un coup dur pour mon amour propre. Si je suis finalement parvenu à dépasser ces résistances, c’est en maintenant fermement cette perspective : il me faut être altruiste et bienveillant envers les autres, parce que j’ai l’intime conviction que c’est là le chemin que mon Créateur m’a ouvert pour perfectionner mon âme et changer mon être profond.


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18 commentaires

  1. cla ra le 11 Nov 2013 à 11:45 1

    Quelle analyse bien menée !

    Il est vrai que je me suis souvent demandé quel effet mes sauts d’humeur pouvaient produire sur les autres.

    Ou alors lorsque je me vois lésé dans mon droit, mes émotions prennent le dessus et mon entourage est amené à me supporter. Probablement que je lèse à ce moment là le droit de mon entourage….Alors qu’ à priori je trouve cela normal de partager mon ressenti.

    C’est dans la famille que l’on perçoit le mieux nos attitudes et nos comportements ; on se connait tellement bien que souvent on ne fait plus les efforts qui s’imposeraient en dehors de la cellule familiale …. ne serait ce que pour préserver une image sociale positive.

    Merci beaucoup pour cette analyse.

  2. MH le 11 Nov 2013 à 12:56 2

    Comme cette expérience est touchante! Bravo pour ce travail sur soi… très complet et quelle persévérance!
    En effet: il vous a fallu beaucoup d’analyse et de perspicacité pour arriver à cette conclusion. Merci de nous l’avoir fait partager!

  3. btd le 11 Nov 2013 à 21:47 3

    Merci pour cet article qui me donne du courage ! et m’invite à reconsidérer bien des choses… dans une toute autre perspective… Comme si je venais de voir un filet de lumière dans ce tunnel si sombre 😉

  4. Or le 12 Nov 2013 à 1:34 4

    Je trouve que beaucoup de points abordés ici me concernent et je retirent quelques points pratiques dont je vais tâcher de m inspirer. Merci pour partager ces expériences

  5. A. le 12 Nov 2013 à 8:39 5

    « En réalité, je n’étais pas au bout de mes peines. Car après quelques jours de cette pratique, j’étais devenu… une personne désagréable au possible ! Un rien m’énervait, les autres m’énervaient, mon humeur était devenue massacrante, et ce d’autant plus que j’étais devenu hypersensible à ce que je percevais dans mon entourage comme de l’ingratitude, une inaptitude à reconnaître les efforts que me coûtaient ma pratique. »

    J’ai vécu exactement la même expérience il y a quelques semaines de cela. Après une longue/fatiguante journée passée avec mes enfants, où j’avais fait mon mieux pour les amuser et leur faire faire des choses utiles, j’avais été l’objet de critiques de la part de mon conjoint et d’ingratitude de la part de mes enfants – et cela en dépit du fait que leur avais bien posé la question de ce qu’ils souhaitaient faire et que j’avais ajusté le programme en fonction de leurs souhaits

    Je n’avais point vu cette mise à l’épreuve si caractéristique du cheminement spirituel : quand on essaie de travailler dans le sens de Sa satisfaction on est testé pour voir si on le fait vraiment pour Lui ou ben pour plaire aux autres – que j’étais devenu d’une humeur exécrable, et cela s’en me rendre compte. C’est seulement au bout de 24 heures que j’ai pris conscience du fait d’être très irrité ainsi que de l’origine de ma mauvaise humeur – ce qui m’a permis de me calmer et surtout de prendre conscience de mes limites !

  6. Happy le 15 Nov 2013 à 22:59 6

    Merci pour cet article, en particulier les exemples très précis et concrets comme « ne pas s’asseoir en fond de table » ou « ne pas laisser traîner ses chaussures dans le couloir ». C’est bien à partir de ces petites prises de conscience qu’on peut espérer faire la différence. J’ajouterai d’autres exemples très simples comme « refermer systématiquement le tube du dentifrice » ou encore « fermer les portes des placards ». Il y a tant d’autres exemples…

  7. KLR le 23 Nov 2013 à 23:00 7

    j’ai eu récemment encore un exemple de pratique altruisme « in vitro », en réalité ce n’était pas du tout une pratique altruiste, mais des jugements et de la frime déguisée.
    Je suis coordinatrice d’un département pédagogique au sein de l’établissement dans lequel je travaille, et mon directeur réunit une fois par mois les différents coordinateurs de département pour discuter de sujets multiples…
    L’une de mes collègues est très émotive, prend son travail très au sérieux, et récemment elle a envoyé des messages à tous les coordinateurs pour expliquer son désarroi avec les collègues de son département : ceux-ci ne répondant pas à ses mails, ne venant pas aux réunions…
    Il y a eu un échange de courriel, avec des tas de conseils pour cette femme. je n’ai pas participé à l’échange.
    La fausse raison altruiste étant que vu l’avalanche de conseils qu’elle recevait, je n’allais pas en rajouter une couche et me placer en « donneur de leçon ».
    En réalité, je portais un jugement sur cette femme. Jugement renforcé par une réflexion qu’elle a donné au sujet de mon département et qui m’est revenue par derrière…

    Dupperie sur l’intention: Lorsque je me suis retrouvée à la session de réunion suivante. Contente de moi, j’ai dit à cette collègue devant quelques témoins, que je n’avais pas répondu à son courriel voyant l’avalanche de conseils…
    Elle a tout de suite dit qu’elle avait fait cela pour se décharger et j’ai senti qu’elle ne voulait pas revenir sur cette épisode.

    En voyant que je l’avais mise dans l’embarras en lui rappelant ce mail qu’elle avait envoyé et sans doute aussi regretté, j’ai réfléchis sur le pourquoi de ma phrase devant témoins…

    Il y avait d’abord la frime: « je ne t’ai pas donné de conseil »
    L’orgueil: « j’étais contente de moi »
    le jugement : « Les autres se sont comportés en donneur de leçon »
    Le manque de compassion : en réalité je n’avais pas ressenti la moindre empathie vis-à-vis d’elle, puisqu’au contraire je me permettais de la juger et de me sentir « au dessus »

    Bref, en une seule phrase, il y en avait des manifestations de l’orgueil et de l’égo !!!

    Après coup, si mon intention avait été altruiste, j’aurai sans doute
    1. Mis un petit mot d’empathie (sans conseil)
    2. Lui parler à cette nouvelle session de réunion, mais en tête à tête et en lui proposant de l’aider

  8. Rem le 28 Nov 2013 à 21:39 8

    Bravo je suis hyper impressionné par ce travail de détection de l’égoisme et surtout oar la persévérance, l’analyse et la volonté mise en oeuvre pour lutter et se changer.
    Woaawwww j’ai du chemin à faire, au secours …

  9. Diane le 29 Nov 2013 à 13:08 9

    @klr
    Bravo et merci pour votre analyse (tout comme à l’auteur de l’article). Lorsque Bahram Elahi parle de connaitre les différentes puissances qui agissent en nous afin de nous connaitre, il s’agit bien de cela, et personnellement, j’ai beaucoup de mal à le faire pour moi ! j’espère que vos exemples vont m’aider à y arriver.

  10. KLR le 30 Nov 2013 à 19:00 10

    Pour revenir sur l’expérience que j’ai cité plus haut :
    Ce qui est étonnant c’est que depuis que j’ai mis ce commentaire et que j’ai un petit peu analysé mes intentions, les relations avec cette collègue ont changé. Nous avons eu une discussion l’autre jour, je me suis mise à l’écouter avec intérêt, elle m’a appris des choses et j’ai senti qu’elle se sentait valorisée et qu’elle était sensible à cette discussion. Aujourd’hui elle a joué pour moi le rôle d’ange gardien.
    Ma voiture était sur le parking de l’établissement et avait les warning allumés. Elle est venue spécialement me prévenir dans ma salle de cours afin que je ne tombe pas en rade de batterie à la fin de la journée !
    Je me suis fait cette réflexion : il n’est pas si difficile en fait de se tourner vers autrui, et de donner un peu de soi. les autres sont souvent en demande d’humanité, de valorisation…
    Il suffit quelque fois simplement de sortir de cet égo, et d’aller à leur encontre.

  11. Ms le 02 Déc 2013 à 2:37 11

    Merci beaucoup pour cet article si détaillé !

    J’aimerai revenir sur la notion des « autres ».

    Me concernant, j’ai le sentiment que je cherche bien plus à avoir le comportement qu’il faut auprès de mes amis, des personnes que je fréquente, plutôt qu’auprès de ma famille … Clairement, cela ne peut fonctionner et je le ressens. Je suis constamment frustrée parce que, d’un côté, je développe des exigences envers les gens que je fréquente et continue à me forcer à bien agir envers eux et, de l’autre côté, je mets ma famille au « second plan » en étant à fleur de peau avec eux et sans avoir un comportement correct.

    Il est vrai que naturellement toute personne va être plus « vraie » avec sa famille et donc montrer ses états d’âme seulement cette dynamique pousse à donner trop d’importance à des gens qui souvent n’en valent même pas la peine …

    C’est certainement aussi parce qu’inconsciemment, on a tendance à se dire que tous membres de notre famille est acquis … En ce sens, ils seront toujours là, pas la peine de faire plus d’effort …

    Cela engendre aussi de l’ingratitude. J’ai remarqué que cette frustration engendre beaucoup de plainte et on oublie vite la chance que l’on a d’avoir une telle famille !

    En somme, je pense qu’idéalement, il faudrait commencer par les membres de sa famille – sans mettre de côté les autres bien sûr – de manière à ce que soit la première priorité.

  12. Ms le 03 Déc 2013 à 23:03 12

    @ KLR : Je trouve votre expérience très touchante et elle me rappelle une discussion que j’ai souvent avec une amie en ce moment : dans ce monde tout le monde souffre en silence.

    Quand on y pense, chaque personne souffre – à différents degrés bien sûr et à différentes périodes – et tente de vivre avec cette souffrance. En général, notre égo et notre orgueil fait qu’on ne va pas montrer cette faille aux gens qui nous entoure mais cela n’empêche qu’elle est réelle et bien là !

    Du coup, je me dis qu’en abordant la vie de cette manière (sans oublier cette réalité si universelle), on interprète différemment les choses qui nous arrivent au quotidien : une phrase prononcée par une collègue, un comportement vexant, etc. Idéalement même, on parvient à aller outre ce qui s’est passé pour s’ouvrir à l’autre l’écouter voire l’aider !

    Finalement, cela reviendrai à dire que quel que soit le comportement des autres – même si ce dernier nous est adressé – ce n’est aucunement contre nous. C’est tout bonnement la manifestation d’un malaise ressenti par cette personne et il s’avère que nous étions dans les parages au moment de cette manifestation. C’est tout.

  13. Radegonde le 15 Déc 2013 à 21:54 13

    je voudrai faire partager l’expérience vécue dans notre service à majorité féminine/ il y a un seul homme.
    Nous sommes soumis à un énorme stress, qui pèse sur tous. Nous en sommes arrivés à mettre en place des contre-stress= la plaisanterie, le chocolat mis à disposition de tous, s’interroger dès que l’un de nous ne revient pas assez vite au service, lui téléphoner pour savoir s’il n’y a pas eu de difficultés/ nous avons eu des collègues agressées récemment ..
    Cela n’évite pas les accrocs inévitables.. mais je suis en admiration devant mes collègues qui luttent ensemble pour travailler à 13 dans de petits locaux..et qui continuent leur mission.

  14. KLR le 22 Déc 2013 à 21:53 14

    Expérience: prise de conscience.

    Au sein de l’établissement scolaire où je travaille, j’ai proposé aux professeurs de plusieurs classes de demander aux enfants de préparer des dessins sur le thème de Noël et de la crèche pour faire un diaporama qui devait illustrer leur petit spectacle.
    Peu de dessins sont arrivés, et je les ai jugé pas terribles, je ne leur ai pas accordé d’intérêt….
    J’ai commencé à préparer un diaporama avec peu d’enthousiasme, en scannant les dessins, puis j’ai mis les dessins à la poubelle.
    Quelques jours plus tard, j’ai voulu rajouter d’autres dessins. Impossible de retrouver le diaporama, qui n’avait pas été enregistré et tous les dessins scannés étaient à la poubelle (poubelle qui avait été vidée !!!). Bref après une heure de recherche, je commence à comprendre que, par mon jugement, ma négligence et mon peu d’intérêt à autrui, je suis en train d’empiété le droit des enfants, et qu’il va falloir leur annoncer cela. Je vois alors l’attente et l’espoir des enfants déçus. Consciente de ma faute, je renouvelle mes recherches sur l’ordinateur puis dans la poubelle.
    Je finis par retrouver les dessins au fond d’une poubelle. Ouf !!! je prends conscience que j’aurai pu vraiment lésé le droit d’autrui, et je me remets à faire le diaporama avec le plus de soin possible.

    Le jour du spectacle, les dessins des enfants (que j’avais considérés comme bâclés, ou inintéressants) paraissaient grandioses et d’une grande beauté projetés sur le grand écran. les enfants étaient tellement fiers et contents, que j’ai ressenti en moi une immense reconnaissance pour Celui qui m’avait aidé à transformer une erreur en bienfait car le plaisir des enfants et de leur parents m’apparaissait avec une telle évidence et une telle pureté.
    Mes jugements et mes aprioris sur la qualité de leurs dessins m’apparaissaient alors complètement déplacés et erronés.
    Comment par apriori et manque d’empathie, j’aurai pu passer à côté de cela !

  15. adissam le 26 Déc 2013 à 15:52 15

    Au sujet du commentaire 7.

    Merci pour cette analyse méticuleuse suite à une expérience d’altruisme « in-vitro ».
    Le point 2 de votre conclusion correspond également à ce que j’ai pu expérimenter et tirer comme leçon ou analyse, à savoir » 2. Lui parler […], mais en tête à tête […]. »

    Dans mon cas, il s’est avéré que la personne m’a elle-même fait remarqué l’importance d’éviter certaines remarques en présence d’autres personnes. Ce commentaire a eu lieu le lendemain et au détour d’une autre conversation.

    Il me vient cette anecdote racontée par Ostad Elahi qui illustre cette idée:
    « Devenir savant, comme c’est facile ! Devenir humain, comme c’est difficile ! » 

    « L’éthique est l’essence même de la grandeur d’âme. C’est pour cette raison qu’il faut en connaître toutes les subtilités. Il y a quelques années, je fus invité chez un ami avec quelques autres personnes dont un certain K, un Monsieur très respecté dans sa région. Au cours de la soirée, on lui apporta un tanbur et il joua quelques airs de façon sommaire et fade. Un des convives, M. Gh., qui connaissait la réputation de mon jeu au tanbur, insista pour que je joue à mon tour. Mais je refusai pour ne pas embarrasser K. Celui-ci pensa que je n’osais pas jouer après lui par crainte de la comparaison. Mais malgré cela je ne jouai pas, car s’il m’avait entendu jouer, il se serait certainement senti humilié… Devenir savant, comme c’est facile ! Devenir humain, comme c’est difficile ! »

    (Extraits de Paroles de Vérité) .
    source: http://www.ostadelahi.com/french/life/html/composer_musician_a.html

  16. Ms le 28 Déc 2013 à 12:50 16

    @ KLR, @ adissam :
    Je me retrouve totalement dans vos commentaires : le contexte dans lequel les choses sont dites est primordial.

    D’une part, j’ai remarqué que si ce n’est pas fait de manière correcte, à savoir en privé / discrètement, le destinataire n’écoute même pas car il se braque donc l’effet escompté n’est pas atteint voire pire le destinataire réagit violemment. L’initiative n’a donc pas marché … Aucun intérêt.

    D’autre part, il y a une forme de rabaissement de la personne qui reçoit l’information possible. J’estime que les critiques, les remarques peuvent très souvent être constructives et sont nécessaires car on ne se voit pas faire, on peut avoir besoin « des autres » pour apprendre sur soi mais il y a une fine ligne entre cette critique constructive et le rabaissement.
    Et, à ce sujet, je pense qu’il faut distinguer entre les membres de la famille et autrui. Je trouve que majoritairement si une critique vient d’un membre de ma famille et qu’une autre personne de ma famille est présente cela peut passer – mis à part le cas où le sujet est extrêmement personnel. Cependant, si on étend la notion aux tiers, c’est autre chose ! Je pense inenvisageable la critique entre deux membres d’une même famille en présence d’une personne extérieure lorsque cette dernière n’est pas concernée. A mon sens, cela n’a pas lieu d’être. Dès lors, pour moi, même si l’idée de départ était d’apporter un avis sur une situation, il n’en est rien : le destinataire est tout bonnement rabaissé, ni plus ni moins.

    Pris dans le feu de l’action, on a vite tendance à oublier quelles sont les personnes présentes autour de nous à l’instant T et comme mon égo ne peut attendre pour se manifester, il peut souvent arriver que le contexte au moment de cette manifestation ne soit pas le bon … De là découlera des conséquences négatives car les conditions n’ont pas été respectées.

    En somme, je pense qu’en analysant le contexte et la manière avec laquelle la situation est traitée, on peut déceler si c’est l’égo qui s’est exprimé ou alors s’il y a une réelle sincérité / compassion dans la démarche.

  17. KLR le 30 Déc 2013 à 18:23 17

    @adissam
    j’aime beaucoup la parole d’Ostad Elahi que vous citez. J’ai toujours trouvé son comportement remarquable…
    J’ai remarqué en analysant mes comportements que je suis souvent à la recherche de gratifications matérielles. Cela est souvent moteur chez moi, mais je suppose que c’est plus ou moins un moteur pour tout être humain.
    Il y a quelques temps, je me disais: « Tu vois, pour être motivée, il faut plutôt penser aux gratifications spirituelles, pour l’autre monde, et non à celle de l’immédiateté.
    J’ai le sentiment que le comportement d’Ostad Elahi dans cette parole obéit « entre autre » à cela ! Quelle force d’âme !

  18. KLR le 26 Sep 2021 à 19:06 18

    Une pratique de l’altruisme in vivo au rattrapage:
    Cet été j’ai eu une expérience intéressante qui m’a fait réfléchir. J’étais en vacances dans un petit logement que je possède en bord de mer. Je me demandais comment être un peu plus utile aux autres, alors que j’étais dans un lieu de repos et de plaisir. J’ai eu l’occasion de proposer ce logement à une amie. cette amie est une relation dans « la bonne société » et lui prêter l’appartement était assez valorisant. D’ailleurs elle a tout de suite été touché et a souligné ma gentillesse, ce qui évidemment était très valorisant pour l’ego. Quelques jours après, je reçois un sms de la fille d’une amie voisine, qui cherchait avec son compagnon un logement de vacances. Ici, ma réaction a été comme une douche froide car autant je suis amie avec les parents voisins, autant je n’ai aucun contact avec la fille, et n’apprécie guère son compagnon. J’en parle bien sûr à mon mari qui était exactement dans le même sentiment que moi. Nous avons même considéré que cette demande était « gonflée ». Nous faisons un mot gentil pour décliner la demande….
    Il nous a fallu 2 jours de discussions entre nous et avec nos consciences pour finalement comprendre que Dieu nous mettait à l’épreuve. En effet d’après Ostad Elahi, lorsque l’on a l’intention et que l’on décide de faire un bon acte, il peut y avoir un effet d’enchainement : par exemple un deuxième acte à faire équivalent se présente et il est beaucoup moins plaisant pour l’égo, voir désagréable, mais il valide l’intention de faire un acte altruiste.
    Une fois que nous avons pris conscience de cette mise à l’épreuve, nous avons pu répondre positivement à cette deuxième demande….
    Nous avons eu le sentiment d’avoir vraiment passé l’épreuve au rattrapage !!! ouf

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